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vendredi 2 août 2013

Voici donc des gouvernements qui ont perdu jusqu’à la capacité de se reconnaître comme colonisés


Lettre ouverte à Monsieur Hollande – Affaire Evo Morales et lanceurs d’alerte, par Alain Gély
31 juillet 2013 par Paul Jorion | Print Lettre ouverte à Monsieur Hollande – Affaire Evo Morales et lanceurs d’alerte, par Alain Gély
Billet invité. Les termes utilisés dans cette lettre ne sont pas nécessairement ceux que j’emploierais personnellement mais il en va bien entendu ainsi de la quasi-totalité des « billets invités » publiés ici. On lira également avec intérêt dans le numéro d’août du Monde diplomatique la déclaration d’Evo Morales : « Moi, président de la Bolivie, séquestré en Europe ». La phrase : « Voici donc des gouvernements qui ont perdu jusqu’à la capacité de se reconnaître comme colonisés », devrait résonner à nos oreilles – Paul Jorion

Monsieur Hollande, Monsieur le Président.
C’est avec consternation et révolte que j’ai appris que vous aviez osé refuser le survol du sol national à Evo Morales, Président de la Bolivie, au prétexte incroyable que Monsieur Edward Snowden - véritable héros de l’Humanité pour nombre de personnes, parmi lesquelles, le journaliste états-unien Glenn Greenwald - pouvait éventuellement se trouver à bord de son avion.
Par cette décision, vous avez déshonoré la France.
Vous avez insulté et humilié tous les Peuples d’Amérique du Sud.
Vous avez manqué de respect à un Président en exercice tout en mettant sa vie en danger car le déroutement d’un avion n’est jamais chose anodine.
Vous avez commis une faute inexcusable et croyez bien qu’elle ne vous sera pas pardonnée car cette faute, au final, aura été de mettre la France à la botte des USA.
En effet, vous leur avez fait complète allégeance, peu de temps après que nous apprîmes que ceux-ci, depuis plus de dix ans, avec la monstrueuse et antidémocratique NSA, au service, surtout, des lobbies et des multinationales états-uniennes, n’ont cessé de nous espionner, Nous, Etats et Citoyens d’Europe.
Mais bon sang ! Auriez-vous oublié que les Françaises et les Français payent durement, avec le risque, qui plus est, de voir survenir un gravissime accident nucléaire sur notre territoire, une flotte de sous-marins atomiques lanceurs d’engins, qui sont à même de nous garantir une totale indépendance de décision ; c’est du moins ce que nous racontent tous les gouvernements, de gauche ou de droite, depuis des décennies.
Si vous n’avez pas le courage de profiter intelligemment de la possession, par ailleurs discutable, de ces terrifiants bateaux, ferraillez-les donc, par la même occasion supprimez la filière nucléaire française – ça fera des économies très conséquentes – qui constitue, avec ses homologues étrangères, une menace suprême sur l’avenir de l’Humanité et laissez ensuite la place de la France au Conseil de Sécurité permanent de l’ONU aux Iles Tonga. Elles y figureront aussi bien que la pitoyable France que vous détruisez et avilissez. Et j’écris cela sans vouloir manquer de respect aux Tonguiens.
Mais comment donc n’êtes-vous pas dérangé par votre irresponsabilité à avoir ainsi cautionné « big brother » ?
Croyez-vous vraiment que les Françaises et les Français ne se rendent pas compte de vos agissements tendant tous à renforcer le néolibéralisme et la puissance hégémonique qui le programment et le pilotent de l’autre côté de l’Atlantique Nord ?
De fait, à vous qui vous disiez « l’ennemi de la finance » on peut dire désormais : Tout votre programme ! Toutes vos promesses ! Tout cela ! Et bien en fait, permettez l’expression : c’est du flan !
La preuve par vos actes !
La preuve par exemple avec les lois sur les banques et la corruption que vous laissez être votées édulcorées et vidées de toute substance, Monsieur Moscovici veillant au grain, mieux que ne saurait le faire quiconque, pour que les gains de la finance restent ce qu’ils sont, fondés sur la spéculation, la corruption et l’usure contrainte et entretenue.
Et la preuve encore avec l’insulte faite au Président Morales, alors que vous dites vous battre pour les entreprises françaises, pour leur trouver des contrats, et donc des possibilités de créer des emplois (ce qui est « votre priorité » à ce qu’il parait). Sachez que si cela avait été vraiment votre but, vous auriez considéré, avant de prendre une si stupide décision d’interdiction de survol, que la Bolivie est le premier gisement de lithium du Monde et que 70 % de la réserve mondiale de ce métal très utile – c’est un doux euphémisme – à la confection de batteries performantes se trouvent dans ces pays d’Amérique latine que vous avez insultés.
D’ailleurs M. Bolloré n’est-il pas passé vous voir, lui, le champion de la voiture électrique, après votre décision irréfléchie ? Car nous le savons désormais, Nous ! Citoyens français : l’Élysée n’est plus que l’Hôtel des doléances pour les grands patrons. Et pour s’en convaincre, il suffit d’examiner la liste de vos conseillers intéressés et affairistes.
Du flan vous dis-je ! Tout ce que vous dites s’avère du flan ! tant vos paroles sont aux antipodes de vos actes.
Mais hélas, et cela restera le pire, c’est qu’il ne sera pas revenu à Marine Le Pen (que l’UMPS se charge par sa bêtise d’amener au pouvoir petit-à-petit) de faire de notre République une dictature. Elle l’est déjà par vous devenue !
D’abord, ne pas avoir proposé d’accueillir Snowden dès le début de l’affaire qu’il a révélée, en ne tenant pas compte de ce que représente la France aux yeux du Monde en terme de liberté, en fut un premier révélateur.
Mais en interdisant à cet homme tous moyens de se sauver de la prison et de la torture états-unienne (je rappellerai là l’existence de Guantánamo et les sorts réservés au soldat lanceur d’alerte Manning et au fondateur de Wikileaks) tout en empêchant que la Bolivie, état démocratique, lui porte secours et lui offre sa protection, vous faite de la France un état qui collabore étroitement avec un état fasciste avéré et qui a fait de l’Élysée une sorte de Sous-préfecture.
Tous les lanceurs d’alerte du Monde sont désormais prévenus : La France ne les aidera pas ; car la France est gouvernée par une classe de personnes qui n’entend pas risquer de se voir déranger par ces gens. Et vous viendriez à dire le contraire, ce ne serait que mensonge. Il me suffirait de vous rappeler avec quelle « extrême fermeté » vous voulez traiter les membres d’une association qui démontrent, par une action pacifique et sans conséquence, que les centrales nucléaires françaises ne sont en rien sécurisées, contrairement à ce qu’affirment les nucléocrates.
Oui Monsieur ! Soyez bien certain qu’une telle volonté « d’extrême fermeté » en pareil cas relève bien de la dictature.
Honte à vous donc, parce que vous craignez ces gens courageux, qu’ils soient Président ou citoyens. Ils sont tout votre contraire, puisqu’ils souhaitent l’intérêt général et un Monde juste, alors que vous NON ! car vous continuez à vouloir être conseillé par une clique de financiers amoraux en perdition, tous assujettis au dieu dollar dont le temple se trouve être la corbeille de Wall Street.
Pour finir, j’avoue que la dérive que vous imposez à la France parait si inquiétante que j’en arriverais à croire que vous êtes capable de fomenter, avec votre maître ultralibéral, un renversement du Président Morales. Vous avez été si désinvolte avec lui. Dans un Monde si calculé. Alors qu’il figure déjà sur une liste noire états-unienne.
Reconnaissez que cette hypothèse apparaît très vraisemblable.
Un gros paquet de lithium ! Pour pareil trésor, le capitalisme n’en serait pas à son premier coup tordu !
Et nous pourrions presque valider l’hypothèse s’il s’avère que Monsieur Bolloré n’a pas pris la peine de passer vous tancer en votre palais – au courant qu’il serait de ce qui s’ourdirait contre Evo Morales – après ce qui pour lui n’aurait pu être qu’une bévue commerciale de votre part mais qui, pour moi et nombre de Citoyens, restera à jamais une faute immense.
Il est un fait évident : Le Peuple de France, plus que jamais, cherche un Personnage d’État capable de comprendre la réalité de la situation mondiale !
Pour Mon Pays que j’aime, je ne peux plus que souhaiter, Monsieur, que vous finissiez le moins mal possible votre mandat.
Alain Gély

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