par Christelle Nadia Fotso - Dimanche 03 juin 2012
Ecrivain, juriste, philosophe et bloggeuse, Christelle Nadia Fotso est
avocate à New-York, spécialiste du droit international et des affaires.
Elle est l’auteure d’un premier roman surprenant, L’Empreinte des Choses Brisées, et écrit régulièrement sur ses deux blogs La Femme révoltée et The Republic of Dissent.
L’Affaire du Sofitel, celle qui
fit connaître au monde Nafissatou Diallo tout en faisant tomber
Dominique Strauss Kahn, n’a réellement d’intérêt, que dans le sens où elle
met la lumière sur des choses qui existent mais qui sont niées, et que si
la version de ce dernier est la plus proche de la vérité à savoir qu’il
n’y a pas eu viol mais une relation consentie entre deux adultes
consentants. Si DSK dit la vérité, il faut bien se poser la question de
savoir ce qu’il a vu en Diallo pour penser qu’il était possible de lui
demander ce qu’il lui a demandé, ou d’accepter ce qu’elle lui a offert
sans rien perdre alors qu’il avait tellement à perdre puisqu’on le sait
aujourd’hui : il en avait trop à cacher. Qu’est ce qui a donc pu convaincre
DSK, libertin intelligent et expert dans l’art de garder l’aspect le
moins glamour de sa vie privée hors des médias, qu’une femme de chambre
d’un hôtel à New York pouvait le satisfaire sans risque pour lui ? La
réponse est toute simple, elle est peut- être scabreuse mais elle va de
soi : Nafissatou Diallo était une être en soi, une de ses femmes avec
lesquelles on ne risque rien en étant rustre et bestial puisqu’elles
sont des objets, des réchauffes-pénis, et surtout des folles de sexe.
DSK n’aurait fait ce
qu’il a fait avec Nafissatou Diallo avec aucune autre femme non
africaine pour la simple raison qu’il était conscient du contexte, de
ses ambitions, de ses ennemis et ses faiblesses. Il « prend » Nafissatou
Diallo parce qu’elle est présente et parce qu’elle appartient à un type
de femmes avec lesquelles tout est faisable, possible et acceptable.
Tout peut se passer très vite parce que DSK se sent maître du jeu, il a
devant lui une femme habituée à servir, faite pour ça et qu’il peut
acheter pour pas grand-chose le cas échéant, il vacille et un événement
inattendu se produit : il se retrouve par terre et totalement exposé.
Cela étant dit, DSK avait raison puisque Nafissatou Diallo demeure, quoi
que l’on pense d’elle et de ses accusations, une coquille, femme vide, un
épouvantail au service de causes plus grandes, plus importantes qu’elle.
Il est majoritairement présumé et accepté que son essence est
inexistante ou n’a aucune importance puisque toutes femmes africaines se
ressemblent, sont les mêmes : elles jouissent lorsqu’elles servent
parce qu’elles ont été créées pour cela, elles sont des bêtes de sexe et
de somme.
La première affaire DSK, particulièrement si l’on considère qu’il n’y a pas eu crime, une affaire qui interpelle sur la blondeur
de la femme africaine, cette créature inventée pour satisfaire les
fantasmes les plus abjects qui ne couvent que des besoins infâmes de
domination et d’exploitation qui sont hélas universels. La question au
centre de tout ceci n’est donc pas raciale. DSK ne sait pas fait
Nafissatou Diallo parce qu’elle est noire mais simplement parce qu’il a
deviné à travers son accent et son physique, qu'elle était une
« africaine » et donc prenable. C’est alarmant de le reconnaître mais la
majorité des hommes noirs auraient pensé la même chose que DSK et sans
aucun doute auraient agi de la même manière s’ils avaient eu une petite
faim au moment où Diallo se trouvait devant eux. Ils auraient probablement
eu moins de scrupules puisqu’ils savent mieux que quiconque que ces
femmes qui viennent du même continent qu’eux sont des essuies-sexes. DSK
a donc tout simplement prouvé qu’il avait la même vision de la femme
africaine que la plupart des hommes et qu’il les respectait autant que
Jacob Zuma*.
La question ici est donc une question de sexe, de genre et de stéréotypes difficiles à anéantir parce qu’ils sont universels. La femme africaine est blonde parce qu’elle est un objet sexuel, un être en soi qui doit servir quelque chose ou quelqu’un et surtout qui est comme les blondes naturelles donc perpétuellement sexuelles puisqu’elles sont faites pour la chose et ne savent pas résister à une érection puisque le désir masculin est leur idole et qu’elles ne sont complètes que possédées, prises, et ainsi comblées. L’africanisation est donc particulière lorsqu’il s’agit des femmes, une chosification, une déshumanisation puisqu’elles occultent toute individualisation en faisant d’une femme un machin toujours courbé, un être sans essence choisie qui reste en toute circonstance une poupée, un animal sexuel qui cherche son maître pour connaître la jouissance.
Je suis toujours frappée par la facilité avec laquelle je deviens pour trop de gens une femme africaine. Je ne m’insère dans l’histoire que parce que mon cas est parlant. Je suis née au Cameroun. Je vis aux États-Unis depuis l’âge de 14 ans. J’ai fait les meilleures écoles américaines. Je suis juriste. J’ai un Masters en relations internationales. Je suis donc une privilégiée dans la société américaine, une preppy comme Obama, Romney et George W. Bush. En dépit de tout cela, pour tellement de gens, je suis Nafissatou Diallo, une femme africaine sans éducation et au plus bas de l’échelle sociale qui attend d’être prise et qui est faite pour servir. Je suis Nafissatou Diallo, une blonde, une femme africaine - particulièrement en France puisque je dois toujours faire face à la présomption que je viens de banlieue, ou que mon éducation ne peut pas changer mon statut de chose sexuelle et le fait que je suis faite pour être utile à d’autres. Cette présomption rend les relations humaines compliquées parce que quasiment tout le monde présume que je suis inculte ; trop de mâles, quelque soit leur couleur de peau, leur statut social, pensent que j’ai envie d’être prise, que je dis non uniquement par coquetterie et que je trouve le harcèlement flatteur. Je me demande souvent quoi d’autre que cette conviction que je suis une femme africaine pouvait laisser penser à quelqu’un que je lui devais tout parce qu’il m’avait traitée autrement qu’avec du dédain.
Vieux mythes et idées reçues détestables
En France, les gens ont du mal à me prendre tel que je suis et me transforment en femme africaine parce que c’est plus confortable alors tout se réduit à des vieux mythes et des idées reçues détestables. Après tout, il faut croire religieusement et sottement en la notion qu’on n’est que ce que l’on est, qu’un singe reste un singe, quelque soit le contexte dans lequel il est dompté, qu’une femme africaine ne peut jamais dépasser ni sa féminité ni son africanité pour affirmer par des actes que l’identité n’est qu’une question de culture qui à son tour n’est qu’une question d’origine et de race puisque pour les femmes africaines l’existence ne précède pas l’essence ou plutôt que leur existence ne sera jamais autre chose que leur essence. Comment expliquer autrement la présomption lourde, honteuse mais omniprésente selon laquelle j’aurais plus de choses en commun avec un banlieusard et un smicard qu’avec un énarque et un bourgeois parisien ? Il est scandaleux qu’en France, l’identitaire ait pris à ce point le dessus sur le social que tous ceux qui se ressemblent doivent s’assembler et avoir la même essence au point que l’individualité soit considérée comme une faute grave ou comme un acte sans réelle signification de trahison...
Aux États-Unis, je suis aussi Nafissatou Diallo, une blonde, une femme africaine. La différence est qu’il y est moins difficile d’échapper à cette condition, bien que le prix à payer soit celui de la marginalité. Au pays de l’Oncle Sam qui est surtout désormais surtout celui de Barack Obama, la marginalité est rentable, mais certaines lignes ne doivent pas être franchies pour éviter des confusions et des complexités qui bousculent la conscience américaine. Obama a dû se résoudre à devenir un homme noir au patriotisme bling bling pour devenir président alors qu’il est un preppy, et qu’il est autant américain que Georges W. Bush bien que son père soit Kenyan (son américanité est banale et non exotique). Je peux refuser d’être une femme africaine dans mon village new-yorkais parce que plaire n’est pas ni ma priorité ni une nécessité puisque j’ai assez d’éducation et d'outils pour séduire en disant non et en affirmant que bien qu’étant noire, j’appartiens au centre casher et non à la gauche couscous et que l’Afrique, je ne sais pas ce que c’est bien que je peux parler avec beaucoup d’amour du Cameroun.
Hélas, parce que le pays d’Obama reste celui où les rapports de force sont essentiels et toujours basés sur des notions abominables, je reste Nafissatou Diallo, une femme africaine lorsque qu’il est question de sexe ou d’amour puisque trop d’êtres sans raffinement ou juste sans ouverture d'esprit, me poursuivent parce qu’ils n’ont ni la culture ni l’intelligence qu'il faut pour comprendre, que chasser n'est pas séduire et qu'il n’y a que dans les contes de fées que les femmes qui ont besoin de sperme pour se nourrir ou s'actualiser embrassent des crapauds et dans les clips de coupé décalé qu’elles chantent mielleusement « Prends-moi cadeau ! »
La question ici est donc une question de sexe, de genre et de stéréotypes difficiles à anéantir parce qu’ils sont universels. La femme africaine est blonde parce qu’elle est un objet sexuel, un être en soi qui doit servir quelque chose ou quelqu’un et surtout qui est comme les blondes naturelles donc perpétuellement sexuelles puisqu’elles sont faites pour la chose et ne savent pas résister à une érection puisque le désir masculin est leur idole et qu’elles ne sont complètes que possédées, prises, et ainsi comblées. L’africanisation est donc particulière lorsqu’il s’agit des femmes, une chosification, une déshumanisation puisqu’elles occultent toute individualisation en faisant d’une femme un machin toujours courbé, un être sans essence choisie qui reste en toute circonstance une poupée, un animal sexuel qui cherche son maître pour connaître la jouissance.
Je suis toujours frappée par la facilité avec laquelle je deviens pour trop de gens une femme africaine. Je ne m’insère dans l’histoire que parce que mon cas est parlant. Je suis née au Cameroun. Je vis aux États-Unis depuis l’âge de 14 ans. J’ai fait les meilleures écoles américaines. Je suis juriste. J’ai un Masters en relations internationales. Je suis donc une privilégiée dans la société américaine, une preppy comme Obama, Romney et George W. Bush. En dépit de tout cela, pour tellement de gens, je suis Nafissatou Diallo, une femme africaine sans éducation et au plus bas de l’échelle sociale qui attend d’être prise et qui est faite pour servir. Je suis Nafissatou Diallo, une blonde, une femme africaine - particulièrement en France puisque je dois toujours faire face à la présomption que je viens de banlieue, ou que mon éducation ne peut pas changer mon statut de chose sexuelle et le fait que je suis faite pour être utile à d’autres. Cette présomption rend les relations humaines compliquées parce que quasiment tout le monde présume que je suis inculte ; trop de mâles, quelque soit leur couleur de peau, leur statut social, pensent que j’ai envie d’être prise, que je dis non uniquement par coquetterie et que je trouve le harcèlement flatteur. Je me demande souvent quoi d’autre que cette conviction que je suis une femme africaine pouvait laisser penser à quelqu’un que je lui devais tout parce qu’il m’avait traitée autrement qu’avec du dédain.
Vieux mythes et idées reçues détestables
En France, les gens ont du mal à me prendre tel que je suis et me transforment en femme africaine parce que c’est plus confortable alors tout se réduit à des vieux mythes et des idées reçues détestables. Après tout, il faut croire religieusement et sottement en la notion qu’on n’est que ce que l’on est, qu’un singe reste un singe, quelque soit le contexte dans lequel il est dompté, qu’une femme africaine ne peut jamais dépasser ni sa féminité ni son africanité pour affirmer par des actes que l’identité n’est qu’une question de culture qui à son tour n’est qu’une question d’origine et de race puisque pour les femmes africaines l’existence ne précède pas l’essence ou plutôt que leur existence ne sera jamais autre chose que leur essence. Comment expliquer autrement la présomption lourde, honteuse mais omniprésente selon laquelle j’aurais plus de choses en commun avec un banlieusard et un smicard qu’avec un énarque et un bourgeois parisien ? Il est scandaleux qu’en France, l’identitaire ait pris à ce point le dessus sur le social que tous ceux qui se ressemblent doivent s’assembler et avoir la même essence au point que l’individualité soit considérée comme une faute grave ou comme un acte sans réelle signification de trahison...
Aux États-Unis, je suis aussi Nafissatou Diallo, une blonde, une femme africaine. La différence est qu’il y est moins difficile d’échapper à cette condition, bien que le prix à payer soit celui de la marginalité. Au pays de l’Oncle Sam qui est surtout désormais surtout celui de Barack Obama, la marginalité est rentable, mais certaines lignes ne doivent pas être franchies pour éviter des confusions et des complexités qui bousculent la conscience américaine. Obama a dû se résoudre à devenir un homme noir au patriotisme bling bling pour devenir président alors qu’il est un preppy, et qu’il est autant américain que Georges W. Bush bien que son père soit Kenyan (son américanité est banale et non exotique). Je peux refuser d’être une femme africaine dans mon village new-yorkais parce que plaire n’est pas ni ma priorité ni une nécessité puisque j’ai assez d’éducation et d'outils pour séduire en disant non et en affirmant que bien qu’étant noire, j’appartiens au centre casher et non à la gauche couscous et que l’Afrique, je ne sais pas ce que c’est bien que je peux parler avec beaucoup d’amour du Cameroun.
Hélas, parce que le pays d’Obama reste celui où les rapports de force sont essentiels et toujours basés sur des notions abominables, je reste Nafissatou Diallo, une femme africaine lorsque qu’il est question de sexe ou d’amour puisque trop d’êtres sans raffinement ou juste sans ouverture d'esprit, me poursuivent parce qu’ils n’ont ni la culture ni l’intelligence qu'il faut pour comprendre, que chasser n'est pas séduire et qu'il n’y a que dans les contes de fées que les femmes qui ont besoin de sperme pour se nourrir ou s'actualiser embrassent des crapauds et dans les clips de coupé décalé qu’elles chantent mielleusement « Prends-moi cadeau ! »
*Le 6 décembre 2005, Jacob Zuma est inculpé pour le viol d'une jeune femme séropositive de trente-et-un ans par le tribunal de Johannesburg. Lors du procès, ses approximations et contre-vérités à la barre sur le mode de transmission du virus du sida font scandale (il a expliqué avoir pris une douche après l'acte sexuel
pour minimiser les risques d'infection) et sont abondamment relayés par
la presse nationale et internationale. Il est également critiqué pour
jouer la carte ethnique et sexiste. Zuma est finalement acquitté de
l'accusation de viol le 8 mai 2006.
Lors de la lecture de la sentence, le juge van der Merwe dressa un
portrait très sévère de la plaignante ainsi que des policiers qui
avaient mené l'enquête, estimant qu'une relation sexuelle consentante
avait eu lieu entre la plaignante et l'accusé. Il n'en a pas moins
réprimandé Zuma pour son comportement sexuel, jugeant qu'il était
« totalement inacceptable » qu'un homme ait des relations sexuelles non
protégées « avec une personne dont il sait qu'elle est séropositive ». À
la sortie du tribunal, l'ancien vice-président sud-africain entama un
chant de libération zoulou, Mshiniwami (« Rendez-moi ma mitraillette »).
À la suite du jugement, l'ANC décide de restituer à Jacob Zuma son poste de vice-président du parti.
À la suite du jugement, l'ANC décide de restituer à Jacob Zuma son poste de vice-président du parti.
Décidément, ces présidents abuseurs courent les rues du monde, fièrement congratulés de leur dynamisme et vitalité virile même par prétoire. Cependant, je suis contente que d'autres claviers que le mien sur mon blog contre leurs féminicides se souviennent de l'actuel apartheid sexiste austral qui règne en SAR. Mais tout le monde a bien oublié le féminicide mortel de la femme du président... Elle est passée à la trappe.
RépondreSupprimerA Christine GMD : oui l'apartheid sexiste c'est un non-sujet, voyons.
RépondreSupprimerHeureusement que quelques africaines se donnent la peine d'en parler parce qu'il ne faut évidemment pas compter sur les hommes !