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dimanche 23 juin 2013

Réponse à Christine Delphy à propos des musulmanes agressées à Argenteuil et du "silence" soi-disant "ahurissant" des féministes

 En ce  qui me concerne, je n'aime guère me sentir suspectée de racisme sous prétexte que je ne dénonce pas quelque chose qui arriverait à une Musulmane.
Personnellement, je dénonce tout le temps ce qui arrive à des femmes, "musulmanes" ou non. Les femmes, musulmanes ou non, qui sont en quête du soutien de défenseuses des droits de la personne, trouvent partout et toujours de l'aide auprès des féministes.

Il y a quelques jours, des femmes musulmanes se sont faites agresser dans un pays majoritairement non-musulman ou l'agression de femmes est quand même le lot presque quotidien d'icelles qu'elles soient "putes" ou "soumises".
Ces femmes-ci ont été agressées parce que portant le voile, a t-il été dit, mise à part que je ne voudrais pas avoir la désagréable impression que l'on me demande de penser qu'elles mériteraient moins que quiconque d'êtres agressées parce qu'elles portent le voile contrairement aux "traînées" qui ne le porteraient pas, et, mise à part également le fait qu'elles ne m'ont en rien semblé chercher le soutien de féministes, j'aimerais rappeler que d'autres femmes (musulmanes ou pas) le sont aussi (agressées) parce que portant la mini-jupe (ou pour tout autre raison injuste que le cerveau ranci d'un ou plusieurs représentants d'une mâlitude à la recherche de "faibles" à persécuter a trouvé bonne) et cela n'est pas agité par une féministe en chef pour culpabiliser les autres féministes sous prétexte qu'elles ne seraient pas immédiatement descendues dans la rue.

La différence entre une agression contre des femmes voilées et contre des femmes en mini-jupe réside, peut-être, dans le fait que cet acte envers les femmes voilées et donc se pliant aux lois musulmanes les plus réactionnaires pourrait être vengé en pays musulman par une agression à l'encontre d'une(d') Européenne(s). Il y a là une dimension politique que n'a pas l'agression habituelle de la femme sans appartenance.

Alors, je sais bien qu'il faut plaire au Qatar et aux E.A.U. pour le "bien" de l'économie francaise (à moins que ce ne soit pour son démantèlement au profit de) et que donc l'aspect anti-musulman d'une agression doit être particulièrement dénoncé. Mais n'est-ce pas curieux de faire des Musulmanes voilées des personnes qui mériteraient plus que d'autres d'être défendues par les féministes parce que voilées ?

Je veux bien condamner une agression physique contre Frigide Barjot, Christine Boutin voire Marcella Iacub (la "pute" et les "deux soumises"), mais d'abord il me semble qu'elles mépriseraient ma prise de position, et pour cause, car leurs choix et leurs idées sont diamétralement opposées aux miennes, et ensuite, si je descendais dans la rue pour elles, ce serait uniquement parce qu'elles sont connues et que les agresser équivaut à agresser toutes les femmes à travers elles. Et pourtant elles aussi passent le plus clair de leur temps à enterrer la cause féministe par un discours prônant des idées aussi rances que celles de la mâlitude dont je parlais plus haut. S'il le fallait, je le ferais mis à part que cela me placerait dans une contradiction totalement "ahurissante" pour reprendre le terme utilisé par Delphy.

Car il se pourrait bien que "les féministes" dont le silence est si ahurissant, paraît-il, ne soient guère empressées à défendre des individuEs qui les haissent ni le port du voile qu'elle ne cautionnent pas, ce qui n'est ni une surprise ni un crime.
Ces femmes se sont tournées vers forces de l'ordre et instances juridiques et ont porté plainte en bonne et due forme. Elles ne sont pas restées les bras croisés et tant mieux. Que devons-nous faire de plus nous autres féministes ?
Devons-nous descendre dans la rue pour défendre le port du voile ? 
Nous ne voulons peut-être pas avoir à le porter nous-mêmes, un jour, ce voile pour avoir trop insisté dans la défense des Musulmanes voilées, défense caduque s'il en est car pouvant vite être assimilée à la caution d'une structure qui a imposé (ou non) à ces femmes cette pratique hautement sexiste.
Est-ce si difficile à comprendre ?
 N'y a t-il pas là une part de "Selbstschutz" (auto-protection) ? Et en quoi cela justifierait-il de nous clouer au pilori ? Nous sommes en situation de permanente injustice et nous ne souhaitons guère y voir s'ajouter d'autres contraintes qui réduiraient encore notre liberté.
Défendre haut et fort un asservissement pour protéger des femmes ce n'est quand même pas très clair comme message.
Défendre des femmes qui nous souhaitent fort probablement la mort à nous autres féministes, étant donné la place des féministes dans un monde où les femmes sont voilées, pourrait bien nous faire passer pour de grosses imbéciles. Nous ne sommes pas dans une sphère supérieure planant au-dessus de la mêlée comme un lobby ayant tout pouvoir et capable d'influer à tout moment sur le pouvoir masculin. Ce serait très beau si c'était le cas.
Si nous étions présidentes de la République, nous pourrions dire "laisser ces femmes tranquilles", "mettez immédiatement les agresseurs en prison". Mais ce n'est pas le cas et nous sommes une catégorie elle-même menacée du port du voile.
Et en ce qui me concerne, JE NE VEUX PAS porter de voile. Que ceci soit clair une fois pour toute.
Je crois que les féministes qui ont depuis trop longtemps pignon sur rue et ont acquis trop de notoriété sont désormais incapables de comprendre que nous autres femmes anonymes puissions être encore et toujours exposées à l'arbitraire masculin.

Et ceci explique peut-être cela.

Le billet auquel se réfère cet article est ici.
Un article encore plus virulent se trouve .
Réponse d'un blogueur, .

(Et que dire du silence assourdissant de Christine Delphy concernant le sort infligé à la Femen Amina et à ses consoeurs en Tunisie ?)

28 commentaires:

  1. Bravo Euterpe. Vous avez mis en mots ce que je n'arrivais pas à formuler.
    Hélène Bertin.

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  2. Voilà qui me réjouis. Merci à vous, Hélène Bertin! ;¬)
    Le discours autour du voile est totalement embrumé et perverti par la forte présence du FN en France. Ne pas défendre les musulman(e)s fidèles à la ligne musulmane dure équivaut maintenant quasiment à adhérer au FN dans l'esprit de beaucoup de gens ! C'est franchement inquiétant.

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  3. J'aime bien votre sincérité et votre logique.
    C'est à La société toute entière de défendre ses citoyen(ne)s . Peut-on descendre dans la rue et faire des pétitions à chaque agression?
    Le geste des individus qui ont agressé ces femmes est imbécile et répréhensible comme peut l'être toute agression mais je ne vois pas en quoi il interpellerait plus que d'autres les féministes.
    Car ce n'est pas une agression contre une femme spécialement mais contre une religion dont les signes extérieurs peuvent être pris comme une agression.

    Personnellement je suis allergique aux signes extérieurs de religiosité comme ces immenses croix autour du cou , ces "barbes" ces voiles ou ces kippas mais ce n'est pas pour autant que j'irais agresser physiquement les personnes qui les portent ostensiblement.

    On ne peut justifier tous ces actes de violence en se taisant mais on ne peut pas non plus défendre toutes ces soi-disant valeurs religieuses surtout lorsqu'on pense et lorsqu'on constate qu'elles ont plus été des instruments (les religions) de soumission et de pouvoir sur les femmes que de leur émancipation.
    Vous avez raison , pour certains le voile serait un signe de lutte contre le FN , c'est effectivement inquiétant. Bezancenot avait même mis en valeur une femme voilée dans une de ses campagnes, c'est dire si les "forces de gauce" ont dévié de leur trajectoire.

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    1. Merci coup-de-grisou. Oui et ce slogan de Laura-Maï Gaveriaux "Toutes femmes, toutes soeurs" me paraît d'autant plus à côté de la plaque que nous avons assez d'exemples criants de femmes françaises médiatiques qui se définissent tapageusement comme ennemies de la liberté des femmes.
      Des amis, par contre, il y en a dans les rangs des hommes et, comme vous avez du l'apprendre, un zéromacho a été assassiné en raison de son engagement contre la prostitution.
      Il y a eu mort d'homme, là !
      C'est quand même un cran plus grave !
      Mais on remarque que les plus acharnées défenderesses des femmes voilées sont souvent les mêmes qui sont opposées à l'abolition de la prostitution. Donc : silence radio.
      Ce qui me donne assez l'impression que la liberté qu'elles souhaitent aux femmes reste relativement limitée.
      Une liberté conditionnelle, quoi.

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    2. "un zéromacho a été assassiné en raison de son engagement contre la prostitution" Ben, je l'ignore! Tu peux être plus précise?

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    3. @ Lora :http://zeromacho.wordpress.com/2013/06/13/violence-communique/

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    4. Clément Méric aurait été tué pour des prises de position abolitionnistes? Je ne l'ai lu nulle par. Je pensais que c'était lors d'une manifestation anti fasciste.

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    5. Je crois qu'il y a eu méprise d'un zéromacho allemand qui n'aurait pas bien compris un message francais.
      Désolée Lora. Je vérifierai ma supposition ultérieurement.

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  4. Bonjour,

    si je ne partage pas votre point de vue sur « la question du voile » en France, je dois admettre que j'ai beaucoup appris du masculinisme de ma propre position, masculine, aussi en me confrontant à la vôtre. Et je crois désormais comprendre que le choix que font les femens, de désexualiser les corps des femmes, de désérotiser leur nudité, porte plus loin, et est évidemment une action offensive bien plus porteuse d'efficacité potentielle parce qu'elle attaque le masculinisme, que celui de se résigner à le couvrir pour le tenir à distance de la bien connue convoitie masculine - stratégie défensive à laquelle il me paraît pourtant aussi compréhensible de vouloir recourir.
    Après tout, il s'agit pour les féministes de comprendre et détruire le système masculiniste, pas de se contenter d'essayer de s'en protéger.

    Néanmoins, il y a dans votre critique de la position de C. Delphy quelques formulations qui me paraissent pour le moins très discutables, et qui me semblent faire bien trop imprudemment place à l'idée que l'Islam constituerait une menace pour une société française libérée de l'obscurantisme religieux – c'est à dire, que cette religion serait en mesure d'imposer quelque comportement que ce soit aux non-musulmans, et en particulier aux non-musulmanes. A défaut de racisme avéré, il me semble y avoir là au moins une faiblesse théorique, quant à la place du racisme dans la société, à son emploi par le pouvoir, et aux conséquences que cela peut entraîner pour le combat féministe

    Ainsi, vous parlez de risques de vengeance sur une Européenne dans un pays islamiste, ce qui me semble revenir à décider unilatéralement que les femmes qui en France portent un voile seraient solidaires, voir une avant-garde de ces régimes-là – et cela me semble un point de vue plus qu'excessif, pour tout dire, cela ressemble à un point de vue de dominant blanc. De même, prétendre que ces femmes voilées souhaiteraient « 'la mort » des femmes féministes me paraît prendre avec un peu trop de zèle la relève de Charlie-Hebdo pour jeter de l'huile sur un feu xénophobe qui n'en a aucun besoin. La question des motivations du port du voile, et de l'éventuelle haine des féministes chez les femmes qui portent le voile ne me paraissait jusqu'il y a peu loin d'être aussi brutalement et radicalement tranchées que vous le présentez ici (on peut toujours lire le recueil « Des filles voilées parlent » à ce sujet). Si haine et mépris il y avait, ils provenaient aussi d'une partie des féministes et surtout de leurs nouveaux « amis »: et l'on a pu constater que les femmes musulmanes portant le voile ne trouvent hélas pas de l'aide auprès de toutes les féministes - en particulier depuis que le néo-conservatisme d'Etat, raciste et patriarcal a entrepris très ostensiblement de mettre en scène la très paternelle libération, de gré ou de force, des femmes musulmanes de France: et de mettre en avant, sur leur dos, un choc des civilisations et des crispations identitaires qui lui profitent toujours.

    Je ne parviens pas non plus à croire un seul instant que la réflexion et la réaction publiée par Christine Delphy (puisque c'est d'abord de cette réaction qu'il est question ici) soit influencée par ce qui pourrait (ou ne pourrait pas) être « bien pour l'économie française », dans sa politique étrangère vis à vis du Qatar ou des Emirats. Il me semble qu'elle est par contre focalisée sur ce qu'il se passe dans l'ensemble de la société française, et sur le fait que ces femmes là ont été agressées à la fois par racisme, et parce que femmes: mais sous couvert de leur atteinte à une légitime sensibilité « féministe », sous couvert de rejet du voile et de la misogynie, qui serait d'abord une caractéristique musulmane.

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    1. Merci Martin Scriberius pour votre commentaire qui va me permettre de préciser mon point de vue.

      Non, pour moi, l'Islam ne constitue pas une menace "pour une société française libérée de l'obscurantisme religieux". Je trouve la France encore bien enfoncée dans son propre obscurantisme religieux. N'oublions pas que le mouvement fanatique "Civitas" est bien français.

      Pour ma part, je considère toutes les religions monothéistes phallocentrées comme nocives pour la liberté des femmes. L'islam ne fait pas exception.

      Non cette religion ne serait pas "en mesure d'imposer quelque comportement que ce soit aux non-musulmans, et en particulier aux non-musulmanes". C'est une religion qui fait - comme les autres (je le souligne et insiste là-dessus) - du prosélytisme - et - comme pour les autres religions - nous pouvons observer, bien sûr, des conversions de non-musulmanes, l'islam n'étant pas une religion étanche qui n'engloberait que celleux qui seraient né.e.s dedans.

      C'est un constat que l'on peut faire et je ne m'en réjouis pas plus que des conversions aux autres religions monothéistes phallocentrées.

      Je reste toujours encore dans l'opposition aux religions monothéistes phallocentrées dont l'islam.

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    2. vLe racisme à l'envers consisterait à mon avis à faire de l'islam une religion à protéger, ce que tendent d'ailleurs de faire certaines personnes. Pourquoi au fait ?

      Je veux bien une réponse à ce sujet.

      Pour ce qui est du risque de vengeance, je rappelle que la plus petite caricature religieuse effectuée en Europe sur l'islam provoque menaces de mort et autodafés de drapeaux nationaux en Orient. Je ne l'invente pas, si ? Songez également à Salman Rushdie, etc... Je trouve étonnant qu'il faille à chaque fois rappeler quelles réactions violentes provoquent la moindre critique de l'islam en pays islamique de la part des fanatiques.

      Non, les féministes ne sont pas en odeur de sainteté auprès de (toutes les) musulmanes croyantes pratiquantes, ce qui paraît quelque peu logique. Comment peut-on à la fois se mettre aussi servilement au service du patriarcat et apprécier celles qui se battent contre lui ? Impossible, à moins d'être schizophrène.

      Bien sûr, toutes les femmes voilées ne se ressemblent pas et certaines le sont par la contrainte en le ressentant fortement comme une contrainte. Je me suis trouvée personnellement seule dans un ascenseur avec une femme voilée qui, tandis que son mari prenait l'escalier et se trouvait loin d'elle, a éprouvé aussitôt le besoin de vite me confier à moi une totale étrangère de type anglo-saxon qu'elle ne supportait pas le voile. Elle a dit cette phrase et est repartie avec son mari comme si de rien n'était. Ce fut une expérience très surprenante.

      Il est clair que beaucoup de femmes n'ont pas le choix et pas seulement dans ce domaine. Et pas seulement sous une forme visible.

      Pour moi, les femmes voilées et les prostituées sont autant les unes que les autres des femmes piégées. Mis à part que certaines vous tueraient plutôt que de se l'avouer. Et celles-là sont particulièrement dangereuses pour les autres.

      Pour ce qui est de l'attitude de l'État, je ne peux pas tellement la commenter. Le propos est ici de se défendre en tant que féministe de l'accusation comme quoi nous détournerions le regard quand - certaines - femmes se feraient agressées. Et je trouve cela inacceptable, personnellement.

      Non, je ne crois pas non plus que Christine Delphy travaille pour l'économie française. Néanmoins il y a une tendance dans l'air qui consiste à faire ami-ami avec le Qatar et les Emirats pour des raisons bassement matérialistes et il ne faut pas négliger les ambiances qui planent. Elles nous influencent parfois à notre insu.

      Peut-être est-ce la raison pour laquelle l'islam est devenue cette religion qu'il ne faut en aucun cas critiquer sous peine de se voir taxer de racisme et à propos de laquelle il est devenu interdit de se taire.

      Ce n'est guère rassurant.

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  5. De même, la façon dont vous envisagez de prendre la défense de femmes anti-féministes maius blanches, célèbres et réactionnaires/catholiques me pose un problème.
    Il me semble que n'importe laquelle des innombrables anonymes, même voilée, victime d'une agression misogyne est tout aussi indiquée qu'une célébrité, « laïque » ou pas, pour représenter « n'importe quelle femme » – et bien plus encore, en fait, qu'une célébrité. Et surtout, on pourrait retrouver là le genre de hiérarchie promues par les amateurs de choc des civilisations entre celles de vos ennemies que vous jugeriez défendables: les catholiques et les réactionnaires blanches, y compris célèbre pour leur combat contre le féminisme à la rigueur, mais les anonymes musulmanes voilées, non. Le « deux poids, deux mesures » dénoncé par Delphy et d'autres, me semble bien illustré ici.

    Il me semble que ce que C. Delphy et quelques autres s'efforcent de faire, avec quelques raisons historiques, c'est de lutter contre ce détournement, cette captation d'une lutte féministe de longue date au profit d'institutions, d'idéologies et de personnes qui sont elles résolument masculinistes et xénophobes, et qui sont en position de Pouvoir en France - ou qui en sont les agents et les soutiens déclarés. A propos des agressions d'Argenteuil, il me semble qu'elles dénoncent avant tout le « deux poids, deux mesures » de la société française – qui fait qu'une série d'agressions contre des femmes voilées reçoit un traitement de défaveur somme toute assez consistant avec le traitement de défaveur que cette même société leur réserve depuis une dizaine d'années au nom du droit des femmes, d'un acquis du «  féminisme ». Il ne s'agit pas de prétendre qu'elles méritent « moins que quiconque » d'être agressées – mais de constater que si le racisme vient ici redoubler la banale haine des femmes, il le fait au nom même d'une très particulière forme de protection des femmes contre l'infériorisation qui leur est faite, au nom d'un féminisme qui aurait gagné en France.
    Et que ce qui doit paraître ahurissant à C. Delphy, c'est le peu d'empressement de tant de femmes et de féministes à se distinguer depuis longtemps de cette mauvaise compagnie là, et à dénoncer et combattre l'usage qui est fait contre elles, par le masculinisme en France, de leur propre combat. Autrement dit, il ne me paraît pas inopportun de dire ici que, si l'Etat patriarcal et les religions comme l'Islam participent pleinement du même masculinisme, le soutien apporté par des féministes à des femmes voilées parce que musulmanes, ciblées en France par le racisme ET le masculinisme ne me semble pas poser pas tout à fait les mêmes problèmes de cohérence que l'adhésion, ou même le simple silence, face à la politique « féministe » d'un état qui ne l'est assurément pas, mais qui est aussi assurément xénophobe - même avec une Najat Vallaud-Belkacem (et quelques autres femmes) au gouvernement – comme face à une société et des média largement gagnés à cette xénophobie repeinte depuis dix ans de « féminisme ».

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    1. "De même, la façon dont vous envisagez de prendre la défense de femmes anti-féministes maius blanches, célèbres et réactionnaires/catholiques me pose un problème".
      Vous n'avez pas saisi l'ironie. Je fais un parallèle entre les fondamentalistes musulmanes et les fondamentalistes catholiques.
      Je ne me sens pas très "soeur" des fanatiques religieuses qu'elles soient catholiques, évangéliques ou musulmanes. C'est pourquoi je dis que JE VEUX BIEN défendre ces femmes mais cela me semble en même temps caduque.
      Pour le reste de votre commentaire j'avoue que je le trouve confus.

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  6. Pour le dire autrement: il me semble que si on laisse l'Etat patriarcal décider que les femmes ne doivent pas porter de voile (si on ne se positionne pas clairement contre lui, en dénonçant la duplicité de la manoeuvre, à chaque fois qu'il juge opportun d'agiter ce chiffon législatif là et d'étendre et renforcer sanctions et interdits visant les seules femmes musulmanes, si on ne dénonce pas l'utilisation cynique qui est faite de ces femmes et du féminisme par l'Etat, le nationalisme raciste et la misogynie en France), on risque de perdre beaucoup de crédibilité à défendre le droit des femmes à porter ce qu'elles veulent, y compris à se voiler, y compris à ne rien porter du tout. Si lune banalisation féministe de la nudité peut être une arme contre l'érotisation et la chosification du corps des femmes, il me semble que la liberté ne passe pas par la seule nudité, mais bien par le choix de s'habiller à sa guise – y compris, de se dissimuler entièrement. On risque de compromettre son combat – ici, le combat féministe contre la chosification des femmes par le système masculiniste, contre le masculinisme -, en compagnie de tout autre chose.
    Il me semble que depuis le début, la « question du voile » n'a connu un tel succès auprès de tant de personnes jusqu'ici étrangères au combat féministe, quand elles n'y sont pas ouvertement et résolument opposées, que parce qu'elle est essentiellement un filet où piéger bien des féministes, obtenu en France en passant une couche de vernis de « défense du droit des femmes » complaisante sur le bon vieux racisme colonial d'une société résolument masculiniste (les photos des rapporteurs initiaux à l'assemblée nationale, messieurs Raoult et cie sur la question sont plus que parlantes: je savais bien, que pour être féministe, il fallait être affligée d'un physique ingrat, mais tout de même...)

    Bien sûr, je suis un homme, et donc je me trouve hors du champ de la question. Il m'est très -trop– facile de prétendre prendre du recul face à une question qui ne touche pas mon privilège masculin de choisir de me montrer habillé ou torse nu en public sans devoir subir les mêmes conséquences qu'une femme. La chosification cible d'abord les femmes, et ce justement au profit des hommes dont je suis.

    Mais tout de même: votre « je ne veux pas porter de voile » me laisse perplexe. (Je n'ai vu ni entendu personne à ce jour menacer ni ambitionner de contraindre les femmes à le porter en France: par contre, depuis une dizaine d'années, on lit et on entend partout de drôles d'individus se dire prêts à les en protéger, par tous les moyens)
    Je crois bien entendre votre position – vous appartenez à une catégorie dominée, et vous ne pouvez peser à votre guise sur le pouvoir masculin – mais il me semble – encore une fois, je vous demande de croire que je m'efforce de garder à l'esprit d'où j'écris ceci - que ce n'est pas du port du voile que vous êtes menacée, que l'infériorisation en France pour l'écrasante majorité des femmes ne prend pas cette forme là, et que pour toutes, voilées ou non, et peu importe leurs vêtements, elle n'est pas une menace mais une réalité permanente – je ne doute pas que vous le sachiez incomparablement mieux que moi: c'est bien de ce m'apprennent les féministes, y compris vous-même, que je tire les remarques que je fais ici - et qu'à chaque fois que le Pouvoir masculin et ses relais médiatiques brandissent ce genre de « menace », à chaque fois que des féministes le laissent faire, ou pire, le relaient, ellils effacent un peu de la conscience de cette réalité que le combat féministe a pu mettre dans les têtes tout en y imprimant un peu plus sûrement leur xénophobie.

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    1. Vous partez du postulat que nous sommes dans un monde très différent du monde musulman qui serait un monde à part avec une culture extra-terrestre qu'il faudrait défendre à cause de sa singularité. Or au début du 20e siècle, une femme se promenant "en cheveux" passait encore pour une prostituée. Une femme "respectacle" ne se dénouait pas les cheveux et portait si possible un couvre-chef. Au 19e siècle, la peintresse Elisabeth Vigée-Lebrun ne put peindre le pape car elle aurait du se voiler et qu'elle ne s'imaginait pas peindre voilée.
      Une femme en France avait à se voiler devant un religieux.
      Je vous signale également qu'avant la révolution iranienne, les Iranien.ne.s ne s'imaginaient guère revenir au moyen-âge et les femmes être contraintes de porter le voile. Pareil pour les Éyptien.nes.
      C'est pourquoi nous ne sommes pas nous-mêmes à l'abri d'un retour soudain au temps les plus obscurs et aux pires périodes de l'oppression des femmes.
      C'est justement parce que je ne suis pas raciste, que je ne pense pas que le cas de l'Orient est particulier et que nous serions plus évolué.e.s (éclairé.e.s comme on dit) que je me fais souci en lisant ces prises de position péremptoires de gens qui estiment vivre dans un monde supérieurou du moins incapable de revenir en arrière.
      Alors même que la France est directement responsable du retour des ayatollahs en Iran et a une tendance marquée à couver les fanatiques et donner une tribune aux nazis sous prétexte du respect de le pluralité des idées alors que les idées fanatiques excluent par essence toutes les autres.
      Je trouve notre point de vue très présomptueux.

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  7. J'ai été très long, Je suis un homme, et je je sais qu'il m'est déjà arrivé plus souvent qu'à mon tour de passer à côté de la pertinence d'arguments féministes radicaux, y compris des vôtres. J'espère y avoir échappé un peu cette fois ci.

    A la lecture des précédents commentaires, j'ajoute que je ne pense pas que le FN n'ait jamais été non plus la menace que le prétendait le reste de la classe politique, mais bien un chiffon de plus. A une « lutte contre le FN » qui ne mange pas de pain, je préfère depuis très longtemps la lutte contre l'organisation sociale – l'état démocratique, sa police, sa nation, ses frontières, son hétérosexisme nataliste et j'en passe et des plus moches, quel que soit le gouvernement, y compris l'actuel - qui sécrète, abrite et brandit ce genre de sinistre croquemitaine pour mieux prétendre à peu de frais s'en distinguer. Je ne pense donc pas que le voile soit le moins du monde un symbole d'une « lutte contre le FN » toujours captieuse à mes yeux – par contre, je pense que la « lutte contre le voile » telle qu'elle est conçue en France rapproche qu'ils le veuillent ou non celleux qui s'y livrent de lui bien plus qu'ellils ne parviennent à l'imaginer. J'ajouterai que beaucoup de celleux-ci n'y seraient probablement pas venu si ellils n'avaient pas été appâtés par une telle imposture.

    Croyez que j'espère bien avoir répondu à vos propos, et non à côté.

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    1. Là encore je trouve votre propos confus.
      Je n'ai jamais dit que revendiquer le voile équivalait à lutter contre le FN mais seulement que de rejeter le voile passerait presque pour une adhésion au FN.
      C'est une idée bien différente.
      Actuellement, on nous place dans une situation impossible. Et on finirait par se demander si agiter aussi ostensiblement le chiffon rouge du FN ne servirait pas aussi à faire accepter l'installation du fanatisme musulman dans un pays qui fait des affaires avec le Qatar et les Émirats Arabes Unis.

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  8. Je n'avais pas lu votre dernière réponse.
    Je précise, en défense de mon long propos, et encore en critique du vôtre, parce que votre prisme sur le sujet me paraît décidément très réducteur, que j'ai écrit et dit au moins autant ce que je pensais de la "liberté de se prostituer", de la masculinité et de sa soi-disant sexualité, ou du rôle de promotion de masculinisme d'un lobby comme le Strass - que ce que je pensais de ce "féminisme" d'état, identitaire, qui cible les musulmanes.
    Et Christine Delphy - encore une fois, c'est de sa prise de position qu'il était question ici - n'a, à ma connaissance, jamais promu ni même été complaisante avec les prostitueurs...

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    1. Désolée ce à quoi vous répondez là ne vous était pas adressé.

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  9. @Martin Scriblerus, ..avant qu'Euterpe ne vous réponde j'ai deux remarques ( entre autres) à vous faire:
    -ce n'est pas aux hommes de juger de la radicalité du féminisme des femmes...ou pas. Elles luttent à leur manière et les hommes ( comme les zéromachos) ne veulent surtout pas se substituer à elles mais juste faire en sorte que les choses changent radicalement.
    -avec cette phrase , vous sous-entendez qu'Euterpe ferait preuve d'un racisme non "avéré":
    "A défaut de racisme avéré, il me semble y avoir là au moins une faiblesse théorique, quant à la place du racisme dans la société, à son emploi par le pouvoir, et aux conséquences que cela peut entraîner pour le combat féministe" , ce que je conteste haut et fort.
    Vous parliez de masculinisme, en voila bien une des particularités: apprendre à une femme ce qu'est le racisme ou le sexisme en parlant de "faiblesse théorique"c'est à dire "vous n'avez pas comme moi approfondi les choses". Bravo pour la modestie!
    Il y a par contre des remarques avec lesquelles je suis d'accord mais je laisse à Euterpe le soin de vous répondre c'est un de ses blogs et elle y aborde à sa manière les sujets qu'elle veut.

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    1. Cela m'intéresserait beaucoup de savoir avec quelles remarques vous êtes d'accord, coup de grisou.

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    2. Euterpe, ça ne touche pas aux réflexions de fond sur lesquelles je me doutais un peu de vos réponses ( que j'approuve d'ailleurs), mais sur la forme.

      Martin Scriblerus a insisté beaucoup pour dire qu'il était un "homme" et comme lui il y a des réflexions que je me suis faites , comme:

      "Bien sûr, je suis un homme, et donc je me trouve hors du champ de la question. Il m'est très -trop– facile de prétendre prendre du recul face à une question qui ne touche pas mon privilège masculin de choisir de me montrer habillé ou torse nu en public sans devoir subir les mêmes conséquences qu'une femme. La chosification cible d'abord les femmes, et ce justement au profit des hommes dont je suis."
      ou encore:
      "je dois admettre que j'ai beaucoup appris du masculinisme de ma propre position, masculine, aussi en me confrontant à la vôtre"
      ou aussi
      "Je suis un homme, et je je sais qu'il m'est déjà arrivé plus souvent qu'à mon tour de passer à côté de la pertinence d'arguments féministes radicaux, y compris des vôtres. "

      je ne l'aurais pas exprimé de cette manière un peu confuse mais ce qu'il dit me semble juste.

      Il est très difficile pour un homme, même le plus attentionné de comprendre toutes les subtilités que vous évoquez . On peut essayer de comprendre intellectuellement mais on a du mal à les appréhender dans sa "chair".
      On ne peut demander à tous d'avoir connu les horreurs commises sur une de leur proche pour comprendre ce que notre société machiste peut générer .

      Cela me paraît donc être bon signe lorsque quelqu'un essaie de comprendre et d'expliquer.

      Mais malheureusement c'est là qu'on se rend compte que la tâche est monumentale et que le problème est loin d'être réglé. J'ai même l'impression qu'on régresse surtout lorsque certaines femmes en rajoutent une couche.

      J'ai signé depuis un certain temps le manifeste zéromacho car je suis indigné qu'en 2013 on puisse encore défendre la prostitution sous divers prétextes plus hypocrites les uns que les autres. Je refuse l'idée que des femmes en majorité et aussi des hommes soient des "choses" à la merci du "client"et qu'on puisse acheter un plaisir sexuel comme un vulgaire objet de consommation, tout en faisant bien souvent subir à cet objet" des sévices qu'on ne ferait pas à sa bagnole!

      Evidemment dans un pays franchouillard où le droit d cuissge reste toujours d'actualité, on s'attaque là à des habitudes , des préjugés et des mafieux qui ne voient pas cette lutte pacifique d'un bon oeil!

      PS: Méric n'a pas été tué parce qu'il faisait partie des zéromachos , c'était un parallèle avec ceux qui tuent "l'autre" pour ses idées.

      "Alors qu’un jeune homme vient d’être tué à Paris pour ses idées, quelles conclusions tirer de ce nouvel incident violent ?"
      C'est ce qui a du prêter à confusion dans la traduction.

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    3. Merci pour vos précisions. Oui,Martin Scriblerus a cherché à comprendre mon point de vue sur les Femen et est revenu sur ses premières positions. C'est rare et je l'en félicite chaleureusement.
      Ici, c'est plus délicat, je pense, parce qu'il y a longtemps que l'on couple "racisme" et "islam" alors que l'islam n'est qu'une religion phallocentrée aussi nuisible pour les femmes qu'une autre et que le racisme n'a rien à voir là-dedans.
      Mais ceci sert quelques factions comme celles des fanatiques qui se sont implantés partout dans le monde et c'est donc devenu difficile de démêler ce que l'on a emmêlé à dessein.

      Oui vous avez raison sur l'interprétation qui a été faite de l'article concernant les zéromachos. J'ai vérifié, c'est exact !

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  10. Tu as parfaitement raison et j'ai beaucoup aimé ta réflexion sur le billet concernant le retour des islamistes honnis par Atatürk en Turquie, je la replace ici :
    "oui mais n'est-ce pas parce qu'il y a volonté de domination des hommes sur les femmes (et l'acceptation/la résignation par les femmes de ce rôle) dans la société CIVILE que les religions les plus machistes prospèrent ? Si vraiment la France était le pays de l'égalité et des droits humains, alors l'islam ne serait pas en "odeur de sainteté". Je crois au contraire qu'il est utilisé comme un excellent instrument de retour en arrière pour les droits des femmes, surtout que l'islam se radicalisant, cela entraîne la radicalisation des autres courants (quand on a vu ces foules aux Manif dite "pour tous" ... ce n'était pas des musulmans)... ça montre une régression générale. Il leur faut que la famille reste traditionnelle, patriarcale, cela a montré à quel point les Français y tiennent"
    C'est pourquoi je n'accepte pas non plus que l'on offre un régime spécial aux femmes voilées sauf si c'est pour les sortir du port du voile comme on sort d'autres femmes de la prostitution.
    Il n'y a pas de "liberté" de "porter le voile". Arrêtons les couilleries.

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  11. Comme d'habitude la personne qui prend l'espace de parole, même en s'excusant de le faire au bout d'un moment (quand même), est un homme...
    Merci pour cet article, j'avais sursauté en écoutant Delphy- et ce n'est pas la première fois hélas.

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    1. Je ne lui en veux pas car il cherche sincèrement à comprendre, je crois.
      Oui, Christine Delphy est bien surprenante. Pendant que les Egyptien.ne.s tentent de se débarasser des Frères Musulmans, pendant que Caroline Fourest s'efforce de démasquer leurs agissement en Europe, C.D. nous demande quasiment d'aller manifester pour la "liberté" (sic) de se voiler. "Hallo ?" Comme on dit en allemand pour demander si quelqu'un a encore tout son bon sens.
      Quant à celle qui nous sort "Toutes femmes, toutes soeurs" : désolée mais je ne vois sûrement pas les choses comme cela et il y a des femmes qui sont plus dangereuses que des hommes quand il s'agit d'opprimer les autres femmes. Plus dangereuses parce que, justement, on ne s'attend pas à être trahi par ses "soeurs".
      Il suffit de penser aux mères exciseuses, aux mères maquerelles, aux rabatteuses de prostituées, etc. Une espèce de femmes qui assure sa survie en servant les masculinistes les plus féroces et pour qui la notion de "soeur" est juste une vaste plaisanterie.

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  12. Dieu n'a jamais été l'ami des femmes et les féministes n'ont rien à faire avec les religions si ce n'est encourager les croyantes (et croyants) à sortir de l'aveuglement de leur croyance.

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    1. Je ne crois pas être en mesure d'empêcher qui que ce soit de croire mais soutenir la liberté de l'esclavage volontaire n'est pas mon combat non plus. De plus le voile n'est pas un signe religieux auquel toutes les croyantes musulmanes adhèrent, loin de là. Énormément d'entre elles ne le portent pas et énormément d'entre elles aussi voudraient bien s'en défaire sans le pouvoir. Car c'est moins un signe religieux qu'un signe de soumission à un certain ordre patriarcal qui fait des femmes des objets de tentation par les cheveux... bonjour le délire !

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