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lundi 6 février 2012

Sastre mais pas Sartre (et encore moins Beauvoir)

Peggy Sastre a commis en 2009 un livre intitulé "Ex utero, pour en finir avec le féminisme".
Il faut comprendre par là, non qu'elle veut VRAIMENT en finir avec le féminisme mais qu'elle prône un féminisme « hédoniste » (car selon elle le féminisme "officiel" serait quoi ? Sacrificiel ?) ou « pro-sexe » (car selon elle le féminisme "officiel" serait quoi ? Antisexe ?) et opposées au courant abolitionniste (sans doute parce que la prostitution est "hédoniste" et "pro-sexe", hein), elle a formé le concept d'« évoféminisme ».

Selon elle (dixit Wikipédia), les féministes françaises de la génération des "Années 1970", telle Gisèle Halimi ou le mouvement Les Chiennes de garde, se sont érigées en représentantes d'un «féminisme officiel » (quelle horreur) et ont confisqué la parole de toutes les autres formes de revendications féministes = Sastre n'a pas de convictions à démarcher POUR quelque chose mais CONTRE quelqu'un, parce que contre quelqu'un c'est nettement plus efficace pour la visibilité dans les médias. Surtout si les quelqu'un.e.s auxquelles la miss s'oppose se font déjà peu ou mal entendre.

En 2010, elle co-signe avec Lola Lafon une tribune sur le traitement médiatique de l'affaire Polanski, publiée notamment dans Slate et Libération.

Voyons un peu, cette tribune dans Libération : et bien la même Peggy Sastre qui écrivait ceci avec Lola Lafon sur l'affaire Polanski :

"(...)

Nous ne sommes rien. Mais nous sommes beaucoup à n’être rien ou à l’avoir été. Certaines encore emmurées vivantes dans des silences polis.

Et nous les détectons, ces droits de cuissage revenus à la mode, ces amalgames défendant la révolution sexuelle, hurlant au retour du puritanisme, inventant commodément un «moralisme» «sectaire» et «haineux», faisant les gros yeux parce qu’une de ces innombrables anonymes utilitaires sort de son «rang», oublie de se taire et parle de justice. Relents de féodalité drapée dans «l’honneur» des «citoyens» «de gauche», éclaireurs de la nation, artistes, intellectuels, tous d’accord, riant à gorge déployée à la bonne blague des «moi aussi Polanski m’a violé quand j’avais 16 ans» - en être, entre soi, cette connivence des puissants. A la suivante. (...)"


et écrit ceci aujourd'hui à propos des affiches sexistes du film "Les infidèles" :

"(...)

En ville, (...) ces agressions visuelles et cognitives perpétuelles que constituent les divers affichages peuplant l'univers urbain.

A mon grand regret, je n'ai pas pu lui dire qu'il s'agissait-là d'une des raisons qui m'avait fait quitter la capitale, car j'ai toujours profité d'une disposition oculaire avantageuse : quand je ne veux pas voir, je ne vois pas. (...)"


Elle a donc décidé de ne plus voir. C'est son droit, mais elle ne s'arrête pas là, elle reproche aux autres de VOIR et surtout de rouspéter :


" (...)

Aujourd'hui, j'ai par exemple lu et entendu bon nombre de mes congénères (sic) déclarer qu'elles étaient heureuses que ces affiches soient retirées. Souvent, cette joie était liée au fait qu'elles leur donnait la nausée : il leur était donc physiquement insupportable de passer devant de telles images et elles étaient soulagées de les voir disparaître de l'espace public.

C'est tout à fait concevable, et même louable, soyons fous (sic), mais en quoi une telle réaction dit-elle quoi que ce soit de la réalité du message véhiculé par les affiches du film incriminé ces derniers jours ?

Je veux dire, je peux très bien imaginer des gens passer devant la photo d'un noir en costume trois pièces (sic) et ressentir un profond dégoût, parce qu'ils sont racistes et que l'image heurte leurs standards personnels sur l'infériorité des "gens de couleur" ; mais dans ce cas, je suppose que n'importe qui d'à peu près sensé concevra aisément que le (gros) problème vient des individus qui regardent, et pas de la personne, ni même du symbole, représentés.

Quelle différence, alors, y-a-t-il avec une femme qui se sent humiliée par une mise en scène "sexuelle" d'une paire de jambes et d'un chignon vu de dos ? (...)"


Le parallèle avec le raciste qui voit un noir en costume trois pièces est très habile. Elle insinue que la femme qui se dit dégoûtée de telles affiches pourrait l'être en raison d'un racisme inconscient envers le mâle blanc dominant et dominateur. Pire : la femme domine et pour une fois que c'est l'homme, cette vision la fait gerber. Les féministes qui ont la ringardise de trouver Gisèle Halimi plus crédible en féministe que miss Sastre se réclamant du néo-féminisme, pardon de l'évoféminisme, lécheur de testicules argentées, sont de profondes anti-mâles de race, si si, elles rejettent les pur-sang de la mâlitude qui sont des sortes de Polanski, certes, mais, et là réside toute la différence : JEUNES (donc beaux, désirables et innocents).

Son racisme à miss Sastre est alors anti-femmes, anti-vieux et anti-pauvres.

Ou alors elle part du postulat que les femmes sont toujours en situation de domination et suppose que leur dégoût ne repose sur rien de tangible : pas de morceaux de femmes placées suggestivement dans des poses rabaissantes et chosifiantes, seulement du sexisme à l'envers. Car ces affiches sont sans doute "hédonistes" et le plaisir de la femme réside de toute façon dans son humiliation, sa chosification et son morcellement, non ? Ces affiches sont "pro-sexes" et même uni-pro-sexe puisque l'on ne voit qu'un visage et que le visage est le premier vecteur de nos émotions déchiffrables pour les autres. Mais c'est normal dans la conception "evoféministe".

Il faudra que l'on me traduise "evo" féminisme (de "Eve", peut-être ?).

Que ne ferait-on pas pour se profiler comme nouvelle féministe ! Malheureusement il faudrait commencer par avoir raison. Et la raison est atrocement absente dans cette démarche.

Car trouver que la femme est supérieure à l'homme euh...que dire à miss Sastre : rappelez-vous ce que vous écriviez pour Polanski, madame. On n'a pas obligatoirement besoin d'avoir 13 ans pour être traitée comme de la viande...ou si ? Et là encore, on retrouve ce que l'on constate chez toutes celles qui se disent néo-féministes en guerre contre la prétendue arrière-garde : en grattant un peu leur discours on découvre que leur motif est essentiellement générationnel. Elles veulent représenter une nouvelle génération et leur unique slogan est en réalité : "Ôte-toi de là que je m'y mette".

4 commentaires:

  1. Un seul mot: Bravo!
    Inutile d'ajouter que je souscris totalement au contenu de ton texte et merci de remettre si efficacement les points sur les i.
    Marre de ces kapos du patriarcat qui se prétendent féministes dans le seul but de pourrir notre cause. Ces usurpatrices sont les pires ennemies de la cause des femmes, il faut les combattre sans relâche. Quant à cette Peggy Sastre, elle n'en est pas à son coup d'essai elle est en effet connue il me semble pour être une grande défenseuse de la prostitution et de la pornographie

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  2. Beau coup de gueule, merci d'épingler toi aussi cette opportuniste.

    J'avais adoré le texte co-écrit avec Lola Lafon (qui, elle, continue d'écrire de très belles choses), il est d'ailleurs toujours dans ma blogroll et y restera.

    Mais là, entre ça et la défense de la pornographie pour enfants (oui, elle en est là :/ ), je crois bien que nous sommes en présence d'une vendue.

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  3. Super dépiotage de texte chère euterpe ! et grosse déception envers pegy sastre, dont moi aussi j'avais adoré le texte contre polansky.

    Mais quelle est cette trouille qui liquéfie les arguments de pegy sastre ?

    Méga raclée administrée collectivement entre les articles de Héloise et Euterpe, vous nous faites un bien fou en remettant à sa place ce french carpette de féministes mortifères. ça donne envie de ramollir les burnes au prochain qui argumente contre un supposé féminisme "castrateur" que semble adopter Pegy Sastre tout comme son homologue Elisabeth Badinter. Mauvaise Route Bis.

    ps : contente du retour de mauvaire herbe que je salut avec joie :)

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  4. A mauvaise herbe : contente moi aussi de te relire !:) Oui ces opportunistes qui n'ont aucune dignité pendant que nous nous essayons-nous de porter haut celle de notre sexe, on se demande franchement si leur plaisir ne réside pas dans l'humiliation. Si encore elles vivaient leur pathologie dans leur coin sans se mêler du débat publique ! Et ben non. Il faut croire que les antiféministes mâles savent également les repérer et les utiliser.

    A Héloïse : si elle se vend, pas étonnant qu'elle vante la prostitution. Mais la pornographie pour enfants par contre, de la part d'une FEMME, celle qui éventuellement les porte dans son ventre, cela relève de la psychiatrie ! Ou alors les pédophiles de la République et du Bilderberger lui ont promis monts et merveilles et le gourde les croit + est prête en effet à vendre non pas père et mère mais nourrissons et petits-enfants. Lamentable.

    Merci gloup. Comme je disais ailleurs, on dirait qu'il y a une carpette-cérbèrette derrière chaque événement machiste en ce moment pour vite stigmatiser les féministes qui se permetteraient, ô scandale !, de râler. Car le scandale c'est nous dans la logique perverse "per verse" (à l'envers)de l'idéologie ambiante.

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