Sur RMC, Nafissatou Diallo ou « le conte de fée » d’une « mocheté »
- « Je me demande, c’est horrible à dire, si c’est pas ce qui lui est arrivé de mieux » ;
- « C’est un conte de fées » ;
- « C’est un tromblon. Elle n’a rien pour elle, elle ne sait pas lire pas écrire, elle est moche comme un cul, et elle gagne 1,5 million de dollars, c’est quand même extraordinaire cette histoire. »
Making of
Charlies Ingalls, riverain de Rue89 et auditeur de
RMC, a contacté Rue89 pour dénoncer les « ignominies » qu’il a entendues
dans les « Les Grandes Gueules » le 21 janvier. Zineb Dryef
Les invités d’Alain Marshall et d’Olivier Truchot, ce lundi 21 janvier 2013, étaient Marie-Anne Soubré, avocate, Franck Tanguy, conseiller en investissement financier, et Sophie de Menthon, chef d’entreprise.
« A combien tu estimes le viol ? »
Comme tous les matins, l’actualité est passée en revue, la neige, les otages en Algérie, le Mali, et au début de la deuxième heure de l’émission, Nafissatou Diallo.« On connaît grâce à nos amis du JDD le montant versé par Dominique Strauss-Kahn, 1,5 million de dollars », annonce l’un des animateurs de l’émission. S’ensuit alors une série de commentaires sur le montant et sur la différence qui existe entre les systèmes juridiques français et américains.
L’avocate Marie-Anne Soubré s’étonne de ce million et demi de dollars qui ne correspond pas selon elle aux standards américains. Mais de toute façon, pour « Nafissatou Diallo c’est énorme », lui répond-on. Et la machine est lancée.
« A combien tu estimes le viol ? »Tels des consommateurs accoudés au bar PMU du coin, la fine équipe du 11 heures de RMC se lâche :
Sophie de Menthon : « Tu veux que je sois politiquement totalement incorrecte ? [...] Je me demande, c’est horrible à dire, si c’est pas ce qui lui est arrivé de mieux. »
Franck Tanguy : « Je ne suis pas loin de penser la même chose Sophie, je me suis fait la réflexion hier. »
Sophie de Menthon : « Moi je pense que l’argent qu’elle a gagné, qui lui permet d’élever sa fille, elle ne l’aurait jamais eu dans toute son existence et j’espère qu’elle oubliera ce moment extrêmement désagréable [...] Il y a des femmes dans la rue, je suis sûre qu’elles ont pensé ça, en disant j’aimerais moi être femme de chambre dans un hôtel et que ça m’arrive. »
Extrait des « Grandes Gueules », sur RMC
« Pretty Woman », « moche comme un cul »
Marie-Anne Soubré essaye pourtant de tempérer ses amis, « il n’y a pas de prix d’un viol ». Rien n’y fait. Sophie de Menthon trouvera quand même le temps de s’émouvoir du sort des femmes. Ah, enfin… Nafissatou Diallo ? Mais non !« Je trouvais scandaleux que ce soit Anne Sinclair qui soit obligée de payer. »Nous voilà rassurés. On nous apprend que des conférences à travers le monde, plutôt bien rémunérées, permettront certainement à Dominique Strauss-Kahn de payer lui-même cette somme. L’honneur des femmes est sauf. Pourquoi s’émouvoir de la dimension traumatisante d’un viol, d’une tentative de viol, d’une agression sexuelle [en août 2011, les poursuites au pénal contre DSK ont été abandonnées en raison du manque de crédibilité de la plaignante, ndlr].
Le destin de Nafissatou Diallo est après tout un « conte de fées », un « conte de fées » vous dit-on. Il ne faut pas oublier qu’il « y a un an c’était une femme de ménage qui gagnait 1 000 euros », « c’est Pretty Woman ». Quoi Pretty Woman ? Même pas voyons, c’est lui faire trop d’honneur pour Franck Tanguy. C’est juste « un tromblon ».
« Elle n’a rien pour elle, elle ne sait pas lire pas écrire, elle est moche comme un cul, et elle gagne 1,5 million, c’est quand même extraordinaire cette histoire. »Extraordinaire en effet. Mais pourquoi toutes ces femmes laides qui se font violer ne remercient-elles pas leur bourreau de s’être intéressé à elles ? On devrait leur coller des procès, surcharger notre justice déjà bien à la peine, non mais ! Laisser vous trousser !
« Une menteuse quand même »
Puis, « Nafissatou, c’est d’abord une menteuse quand même », « quand elle est entrée dans le pays, elle a raconté des histoires ». Alors c’est bon hein, un petit viol, une petite agression sexuelle…Marie-Anne Soubré essaye toujours de ramener ses amis à un peu de raison, consciente de la gravité des propos tenus, mais rien n’y fait. Franck Tanguy ajoute même :
« C’est un horrible événement dans sa vie dont certainement elle se rétablira, mais pour elle c’est quand même… ça va quoi ! »Une heure se passe. La suite de l’actualité… Peut-on espérer un mea culpa peut être à la fin de l’émission, parce que la direction de RMC aura eu vent de ces propos ignobles. Ecoutons la suite.
Un auditeur : « C’est minable »
En fin de programme, un auditeur a la possibilité de reprendre l’un des intervenants du jour pour lui exprimer son désaccord. Philippe, commercial en Indre-et-Loire, est à l’antenne.Il exprime auprès de Franck Tanguy tout le dégoût qu’il a ressenti en l’écoutant. Ses propos à l’égard de cette femme « laide, moche, simple femme de chambre, pas intello », cette « inégalité de considération humaine » quand il s’agit d’une femme violée, de la part d’un homme qui défend de tout son être la cause des homosexuels.
Philippe rappellera aussi à Sophie de Menthon le temps ou elle disait avoir été victime « de tentatives de baisers forcés ». Pour son bien certainement ? Ou alors, non, madame Sophie de Menthon ne saurait considérer un viol, ou même une tentative de viol à son égard comme un conte de fée, voyons, pas les mêmes valeurs... Nafissatou Diallo, quelle immense chance d’avoir été violée par DSK.
C’est « minable » lancera Philippe. Minable, il a dit minable ? Oui minable. Et là ? On se dit, ça y est, Philippe y est arrivé, il a exprimé ce que beaucoup ont pu ressentir en écoutant la logorrhée Tanguyesque assaisonnée de sauce de Menthon.
Loin de là voyons, naïf que nous sommes. Jusqu’au bout dans l’ignominie, Franck Tanguy continuera à soutenir sa thèse. Plus d’un million de dollars pour un laideron, on croit rêver : c’est elle qui aurait dû payer !
Sur Rue89
Commentaire choisi dans ceux qui accompagnent cet article :
"Cette émission de RMC qui ne vit que parce qu’elle a de l’audience, n’est que le reflet d’une partie de notre société. Les blagues sexistes et racistes ont toujours fait le meilleur effet le soir au comptoir du bar de l’agriculture et du commerce réunis à la troisième tournée de pastaga. Des Philippe qui sont capables d’aller voir la joyeuse troupe en train de lapider du « nègre », de « l’arabe » de la « gonzesse » et autres « PD » en ressortent rarement intactes. Le must pour ces beaufs ordinaires, c’est quand des « de Menthon » et « Tanguy » parlent comme le « peuple des comptoirs », au ras des couilles"
(signé padiran, chroniqueur grolandais)