La
justice tunisienne a ordonné jeudi la remise en liberté d'Amina Sbouï,
militante du groupe féministe Femen incarcérée depuis le mois de mai. La lycéenne de 18 ans, qui a fait scandale en mars et
a été menacée pour avoir publié sur internet des photos d'elles seins nus à la manière des Femen, doit désormais attendre de son procès pour profanation de sépulture.
Elle risque encore deux ans de prison
pour avoir peint le mot «Femen» sur le muret d'un cimetière de Kairouan
(150 km au sud de Tunis) afin de dénoncer un rassemblement salafiste.
«C'est une grande surprise», s'est réjoui son
avocat Halim Meddeb, précisant que sa cliente serait «libre dans quelques heures».
La mère d'Amina, que la jeune fille a accusée de l'avoir séquestré après
la publication des photos dénudées, a aussi exprimé sa joie. «Je suis
heureuse, je vais tenir enfin ma fille entre mes bras, la justice a
montré qu'elle était indépendante», a-t-elle dit.
VIDEO. En avril, Amina disait avoir fui sa famille
Lundi,
Amina Sbouï a été blanchie des accusations d'outrage à des gardiennes de prison.
Elle avait dénoncé la pratique de certaines formes de torture dans la
prison de Sousse (Sud) où elle était retenue. Une de ses co-détenues
avait dû rester cinq heures debout en plein soleil pour ne pas avoir
salué une gardienne. «C'est un soulagement, cela prouve qu'une partie de
la justice tunisienne au moins est indépendante», avait déclaré son
avocat à l'issue de cet acquittement.
L'emprisonnement d'Amina a déclenché un vaste mouvement de solidarité en
Tunisie comme à l'étranger, ONG, opposants et militants des droits de
l'Homme voyant dans son arrestation une preuve du puritanisme que les
islamistes d'Ennahda, qui dirigent le gouvernement, veulent imposer à la
Tunisie.
Malek Boutih, député PS de l'Essonne lui a récemment témoigné sa solidarité en posant torse nu, avec son écharpe tricolore.
Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement et ministre des
Droits des femmes, a exprimé le «soulagement de tous ceux qui sont
attachés à la liberté d'expression», après la décision de la justice
tunisienne. Le premier secrétaire du PS Harlem Désir a lui évoqué une
«grande joie».
Trois militantes Femen européennes avaient en outre été
incarcérées en Tunisie pendant plusieurs semaines pour avoir mené une
action seins nus à Tunis, la première dans le monde arabe, et dénoncer
les atteintes aux droits des femmes. Elles ont finalement été expulsées
du pays après avoir été condamnées à de la prison avec sursis.
Polémique sur le statut des femmes en Tunisie
L'opposition laïque accuse régulièrement le gouvernement dirigé par
Ennahda de chercher à juguler la liberté d'expression et de viser à
revenir sur les acquis des Tunisiennes. A l'inverse, les autorités,
Ennahda en tête, se sont toujours défendues de vouloir revenir sur les
acquis des femmes en Tunisie, qui bénéficient de la législation la plus
libérale du monde arabe sans pour autant que l'égalité des sexes soit
garantie.
Et la dernière ébauche du projet de Constitution, dont l'adoption est
paralysée par une profonde crise politique déclenchée par l'assassinat
d'un opposant la semaine dernière, stipule que «tous les citoyens et
citoyennes ont les mêmes droits et devoirs» et que l'État protège «les
droits de la femme et soutient ses acquis». Cette formule semble pour le
moment faire consensus. Elle a été négociée après qu'Ennahda a fait
scandale en 2012 on voulant introduire la notion de «complémentarité»
des sexes dans la loi fondamentale.
Sur
leparisien.fr
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