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lundi 24 octobre 2011

DSK, le grand déballage


Sexe, argent et politique. La présence de Dominique Strauss-Kahn, qui pourrait être entendu cette semaine, pimente le sulfureux dossier de prostitution lillois.

Huit mises en examen prononcées à Lille pour "proxénétisme", dont celles d’un avocat et d’un policier, six placements en détention provisoire, plus quatre en Belgique avec l’incontournable "Dodo la Saumure" et ses complices… Quelque part entre un film de Claude Chabrol et un roman de James Ellroy, la banale affaire de prostitution transfrontalière, dite du Carlton, à l’intention de notables dans des hôtels lillois, prend des proportions inattendues. Comme l’avait anticipé Le Journal du Dimanche de la semaine dernière, ce sont les trois voyages aux États-Unis de certains protagonistes, accompagnés de prostituées, pour y rencontrer celui qui était encore le patron du FMI, qui ont mis le feu aux poudres. Dominique Strauss-Kahn a demandé dimanche dernier à être entendu pour "mettre un terme aux insinuations et extrapolations hasardeuses et malveillantes". Son souhait devrait être exaucé. Mais le grand déballage reste encore à venir.

Plusieurs prostituées ont déjà raconté, sur PV, leurs parties fines avec l’ancien patron du FMI dans un hôtel parisien, le Murano, avec piscine sur la terrasse. "Certaines escorts étaient black, et ce qu’elles racontent n’est pas à mettre entre toutes les mains", confie une bonne source. Sur les écoutes, depuis le mois de mai dernier, Strauss-Kahn s’appelle "le gros" et il est beaucoup question de "colis" à lui livrer. Selon un avocat du dossier, un autre personnage politique, accompagné d’une amie, aurait aussi fait le voyage de Washington, tous frais payés. "Mais il n’aurait pas participé aux réjouissances avec les “secrétaires” du groupe Eiffage"…

Qui paie et dans quel but ?

C’est la question sous-jacente dans cette nouvelle affaire DSK. Pourquoi le patron d’une société de location de matériel médical et celui d’une filiale du groupe Eiffage dans le Nord -Pas-de-Calais ont-ils dépensé des dizaines de milliers d’euros en notes d’hôtel, de restaurant, en billets d’avion et en prestations sexuelles au profit de policiers, d’élus et d’un ex-présidentiable ? Le premier, Fabrice Paszkowski, est un proche de DSK, engagé politiquement. Il a été mis en examen et écroué vendredi (lire ci-dessous).

Mis en examen pour "proxénétisme aggravé en bande organisée", David Roquet a expliqué aux enquêteurs qu’il écrivait "DSK et le nombre de personnes présentes" au dos des factures et qu’il avait l’"aval" de son patron. Ce dernier a réagi vendredi en annonçant "la mise à pied à effet immédiat" de son collaborateur. Par ailleurs Eiffage – qui a gagné l’appel d’offres pour la construction du Grand Stade de Lille – se constituera partie civile dans ce dossier dès lundi. "Au bal des faux-culs il y aura toujours des places, rugit l’avocat de Roquet, Me Éric Dupond-Moretti. Imaginez que DSK ait été élu président, est-ce qu’Eiffage se serait constitué partie civile ?"

À la grande colère des avocats des responsables des hôtels lillois tous écroués – Mes Berton et Snykerte, qui dénoncent une justice à deux vitesses – le commissaire divisionnaire Jean-Christophe Lagarde, patron très apprécié de la Sûreté départementale, a été placé sous contrôle judiciaire vendredi soir après sa mise en examen pour "proxénétisme en bande organisée et recel d’abus de biens sociaux". De la même façon, DSK est sous la menace, lui aussi, de poursuites pour recel d’abus de biens sociaux… "Rien ne dit qu’il savait qui payait", pondère Me Dupond-Moretti.

Le flic de DSK?

"Je ne les ai jamais vus tous les deux ensemble, mais c’est bien Dominique Strauss-Kahn qui me l’a recommandé." Jean-Jacques Urvoas, député du Finistère et M. Sécurité au PS, ne cachpas qu’il connaît le commissaire divisionnaire Jean-Christophe Lagarde. "Depuis un an, il participe aux réunions de travail de la fondation Terra Nova, à l’Assemblée nationale. Pour moi, c’est quelqu’un de précieux, un policier de terrain, un homme de gauche et puis ce n’est pas un conceptuel mais un pragmatique. Quelqu’un de franc du collier. » Les deux hommes ne se sont pas parlé depuis le scandale lillois. "Je lui ai laissé un message, indique le député, il m’a répondu par SMS quelque chose comme “c’est compliqué, je t’expliquerai”…"

Jean-Jacques Urvoas se dit "surpris" par la mise en cause du commissaire. Moins par celle de Fabrice Paszkowski, qu’il avait rencontré en compagnie de Lagarde. "Paszkowski appartient, lui, clairement aux cercles strauss-kahniens, poursuit Jean-Jacques Urvoas. Il était sa tête de pont dans le Nord, notamment dans l’association À gauche en Europe, présidée par Pierre Moscovici. Contrairement à Paszkowski, je n’ai pas le sentiment que Lagarde était un vieux copain de DSK, mais il y avait une grande confiance entre les deux." Au point que Lagarde puisse s’imaginer dans la peau du "flic du président", mi-garde du corps mi-poisson pilote au ministère de l’Intérieur une fois son mentor élu à l’Élysée? Jean-Jacques Urvoas ne dément pas…

Un autre policier accroché

"Il avait tout dit à sa femme, mais rien à sa hiérarchie", résume-t-on place Beauvau. Jean-Claude Menault, le directeur départemental de la sécurité publique du Nord, a peut-être sauvé son couple, pas sûr qu’il sorte indemne de son aventure aux États-Unis. Une enquête administrative de l’IGPN (l’Inspection générale de la police nationale) a été diligentée à son encontre. Menault faisait partie des invités, tous frais payés par le groupe Eiffage, d’un voyage à Washington en décembre 2010 pour y rencontrer le patron du FMI… en compagnie de deux soi-disant secrétaires d’Eiffage. Le témoignage de Jean-Claude Menault, même s’il assure être resté à l’écart des agapes, pourrait néanmoins intéresser les juges lillois.

Stéphane Joahny et Laurent Valdiguié - Le Journal du Dimanche

dimanche 23 octobre 2011

Paru dans leJDD

2 commentaires:

  1. "Parties fines"... quel euphémisme, repris en boucle par les médias! Se rendent-ils compte que ça minimise les faits?
    Ici, c'est des clients prostitueurs et des femmes utilisées sexuellement, de la prostitution, quoi, pas du sexe libre en groupe.

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  2. A Lora : oui c'est toujours d'un point de vue masculin. De plus, on part toujours du postulat que la prostituée y trouve du plaisir. Cela vient du fait que dans ses prestations est inclu la simulation du désir et du plaisir.
    On dit aussi "dames de petite vertu" comme s'il était question de femmes un peu nympho. Il y a tout un mythe à déconstruire et une absence totale de volonté à le faire.

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