Traduc' (progressive (chaque moment de libre un peu), de l'article "Bordell Deutschland" in : SPIEGEL n°22/27.5.13)
Sans protection
La prostitution est censée être en Allemagne un métier comme n'importe quel autre. Les politiques se considèrent comme libéraux, mais la situation de beaucoup de femmes est terrible : elles sont exploitées par des proxénètes et des trafiquants d'êtres humains.
Sânandrei en Roumanie est un village pauvre avec des maisons délabrées et des chemins boueux. 80 % des jeunes n'y ont pas de travail, et une famille peut s'estimer heureuse quand elle possède un jardin dans lequel poussent des légumes et des patates.
Alina est devant la maison de ses parents, l'une des plus vieilles de Sânandrei, elle porte des bottes de fourrure, un jean étroit et raconte pourquoi elle voulait s'en aller, il y a 4 ans, alors qu'elle en avait tout juste 22. Elle parle de son père qui buvait, qui battait sa mère et parfois sa fille. Alina n'avait pas de travail et pas d'argent.
Par le nouvel ami d'une amie elle avait entendu parler de l'Allemagne : que l'on pouvait se faire facilement 900 euros par mois en se prostituant.
Alina se mit à réfléchir. Tout lui sembla mieux que Sânandrei. "Je pensais que j'aurais ma propre chambre, une salle de bain et pas beaucoup de clients." En été 2009, son amie et elle sont montées dans la voiture de l'homme et ont traversé la Hongrie, la Slovaquie, la Tchéquie jusqu'à la capitale allemande. Pas dans le quartier chic de Berlin-Mitte mais à Schönefeld, où déjà le nom de l'établissement indiquait le niveau "Airport Muschis" ["Muschi" signifie "vulve" en argot allemand ("la moule") NDLT]. Spécialité de la maison : les tarifs forfaitaires. Pour 100 euros la soirée, le client s'offrait du sexe à volonté aussi souvent et aussi longtemps qu'il le voulait.
Tout se passa très vite, raconte Alina. Il y avait là des Roumains qui connaissait l'homme avec lequel elles étaient venues. Elle dut donner ses effets et recevoir en échange des dessous minuscules. Quelques heures après son arrivée, elle dut recevoir les premiers clients. Si elle n'était pas assez gentille avec eux, on lui diminuait ses revenus.
Les clients berlinois payaient le forfait à l'entrée. Certains à l'aide de produits spéciaux tenaient toute la nuit. Il y avait la queue devant la chambre d'Alina. Au bout d'un moment, elle a renoncé à compter le nombre d'hommes qui montaient dans son lit. "Je l'ai refoulé", dit-elle, "ils étaient tellement ! Tous les jours".
Alina dit qu'elle et les autres femmes devaient donner 800 euros par semaine aux proxénètes. Dans un dortoir, elle devait partager un lit avec trois autres femmes, il ne s'y trouvait aucun autre meuble. De l'Allemagne elle n'aurait vu que la station-service Esso du coin. Là, elle avait le droit, accompagnée d'un surveillant, d'acheter des cigarettes et des chips. Le reste du temps, elle était sequestrée dans le club.
D'après l'enquête qui a été faite par la suite, les femmes du club offraient des relations vaginales, orales et anales et lors des gangbang devaient servir plusieurs clients en même temps. Sans capote. "Je n'avais pas le droit de refuser quoi que ce soit" dit Alina. Pendant les règles, elle se mettait une petite éponge à l'intérieur pour que les clients ne s'en apercoivent pas.
Elle n'a presque pas été battue, les autres femmes non plus. "Ils ont dit qu'ils connaissaient assez de gens en Roumanie, qu'ils savaient où habitaient nos parents. Cela a suffit". De temps en temps, Alina appelait sa mère sur un portable. Elle lui mentait, racontait que c'était super en Allemagne. Une fois, un proxénète donna 600 euros à Alina, elle parvint à l'envoyer à sa famille.
L'histoire d'Alina n'est pas unique en Allemagne. Des organisations humanitaires et des experts évaluent à 200 000 les prostituées qui travaillent en Allemagne. D'après plusieurs enquêtes - comme celles de Tampep, le réseau européen pour la prévention contre le HIV/STI et de santé chez les travailleuses du sexe migrantes - 65 à 80% des femmes viennent de l'étranger. La plupart vient de la Roumanie et de la Bulgarie.
La police ne peut pas aider des femmes comme Alina. Les proxénètes sont préparés aux descentes, dit Alina, ils se vantaient de connaître des policiers."Ils savaient quand un contrôle devait avoir lieu". Elle n'a donc jamais osé se confier à un policier.
Les proxénètes disaient aux filles quelle histoire elles devaient raconter. L'histoire était la suivante : la femme avait fait une recherche sur Google par internet depuis la Bulgarie, par exemple, et vu qu'on pouvait gagner beaucoup d'argent dans un bordel en Allemagne. Elle s'était achetée un ticket de bus et était venue sonner à la porte du club.
Toute seule.
Il y a de fortes chances pour que chaque policier travaillant dans le milieu prostitutionnel entende ce même mensonge maintes fois répété, ainsi derrière ce refrain tous les indices d'un trafic humain de femmes vers l'Allemagne, sont dissimulés. Cette déclaration fait des femmes comme Alina des prostituées volontaires, des entrepreneuses qui ont choisi leur activité librement et à qui l'Allemagne veut donner de bonnes conditions pour exercer leur métier.
C'est comme cela que les politiques se représentent les prostituées : assurées sociales volontaires, travaillant dans la joie et la bonne humeur et avec un compte à la caisse d'épargne - les "travailleuses du sexe émigrées" comme les appellent les sociologues, des travailleuses indépendantes ambitieuses qui veulent tenter leur chance dans une Europe en expansion.
En 2001, le parlement allemand promulguait, avec les voix de la coalition SPD/Les Verts, une loi sur la prostitution qui devait améliorer les conditions de travail des prostituées. Les femmes allaient pouvoir porter plainte en cas de problème concernant leur salaire et cotiser à la sécu, au chômage ainsi qu'à la retraite. Pute - devait devenir un métier comme employée de banque ou assistante dentaire, il devait être accepté pas méprisé.
Suite à la promulgation de la loi au parlement, les propagandistes du travail volontaire du sexe, la ministre de la famille, Christine Bergman (SPD), avec la chef de la fraction des Verts au parlement, Kerstin Müller, célébrait la victoire avec une coupe de mousseux et trinquaient avec la tenancière d'un bordel berlinois, Felicitas Weigmann, qui s'appelle aujourd'hui Schirow de nom de famille. Trois femmes d'humeur à faire la fête parce que des hommes allaient pouvoir aller au bordel sans se poser de question.
Entre temps, beaucoup de policiers, des associations pour les droits des femmes et des gens de la classe politique qui connaissent la prostitution de près, en sont convaincus : la loi bien-pensante est juste un programme d'encouragement pour les proxénètes et rend attractif le trafic humain.
Avec la promulgation de la loi sur la prostitution, la loi pénale a été également modifiée. En remplacement de "encouragement à la prostitution" on a nommé le nouveau délit "exploitation de prostituées", le proxénétisme n'étant encore considéré comme un délit s'il possède un caractère d'exploitation ou s'il est "dirigiste". La police et le justice désespèrent parce que de telles nuances sont impossibles à prouver. Un proxénète peut être considéré comme abusif lorsqu'il prend plus de la moitié des revenus d'une prostituée. C'est rarement prouvable. En 2000, 151 personnes ont été jugées pour proxénétisme, en 2011 il n'y en a eu plus que 32.
Les initiateurs de cette loi voulaient renforcer les droits des femmes - et pas ceux des malfrats. Ils ont espéré que les tenanciers de bordels utiliseraient cette loi pour (enfin) "instaurer de bonnes conditions de travail hors de toute illégalité" comme le ministère de la famille voyait les choses.
Avant cela, la prostitution n'était pas non plus passible des tribunaux mais elle était considérée comme contraire aux bonnes moeurs. Les bordels étaient tolérés sous l'appelation de "location de chambre à des fins commerciales".
11 ans après la valorisation de la prostitution, il y a 3000 à 3500 établissements de prostitution en Allemagne, d'après l'estimation de la société des entreprises de commerce érotique d'Allemagne (UEGD). Le syndicat des métiers de service Ver.di estime que le business de la prostitution en Allemagne dégage 14,5 milliards de chiffres d'affaire par an.
A Berlin, il y aurait 500 bordels, dans la modeste bourgade d'Osnabrück on en estime le nombre à 70, dans la petite Sarre, il y en aurait 270. Les bordels de la Sarre sont visités par beaucoup de Francais. Dans les environs de l'aéroport de Schönefeld, des clients viennent d''Angleterre et d'Italie.
Les organisateurs de voyage offrent jusqu'à des tours de 8 jours dans des bordels allemands. Les excursions seraient "légales" et "sûres" est-il écrit sur un site à ce sujet. On y promet aux intéressés jusqu'à 100 femmes totalement nues" qui portent des chaussures à talons aiguille. Pour le parcours depuis l'aéroport aux clubs, une BMW est mise à disposition (plus sur le tourisme sexuel en Allemagne sur SPIEGEL TV le 9 juin à 22.15 h. sur RTL).
[suite]
À côté de Clubs dit naturistes ou saunas - les clients portent une serviette autour des hanches, les femmes sont nues - c'est là que les grands bordels se sont implantés. Ils font de la publicité pour des tarifs "tout inclusif". Lorsqu'en 2011, le Pussy-Club a ouvert à côté de Stuttgart, les tenanciers distribuaient de la pub : "Du sexe avec toutes les femmes aussi longtemps que tu veux, aussi souvent que tu veux et comme tu veux. Sexe, Sexe anal. Sexe oral. Nature. Sexe de groupe à 3. Gangbang". Pour 70 euros la journée, 100 le soir.
Selon la police, le weekend de l'ouverture ce sont 1700 clients qui répondirent à l'offre. Des bus vinrent de loin. Les journaux locaux écrivirent qu'il y avait un queue de près de 700 hommes devant le bordel. Sur les forums d'internet, les clients s'échangèrent leur opinion sur le service qui aurait été insuffisant : après quelques heures les femmes n'auraient plus fonctionné que de facon limitée.
Le commerce serait devenu plus dur, dit une travailleuse de rue de Nuremberg, Andrea Weppert, qui s'occupe depuis 20 ans de prostituées. Le nombre des prostituées aurait triplé. Plus de la moitié des prostituées n'auraient pas d'appartement mais voyageraient de ci de là selon qu'elles penseraient pouvoir gagner un peu plus.
Aujourd'hui, il y aurait un "grand pourcentage de prostituées qui n'auraient pas de soirées de libre, ne pourraient pas rentrer à la maison mais devraient se tenir en permanence sur leur lieu de travail" comme une ex-prostituée dont le pseudonyme, Doris Winter, le décrit pour un dossier scientifique intitulé "la loi sur la prostitution". "Les femmes habitent majoritairement dans la pièce où elles travaillent".
À Nuremberg, cette pièce coûte de 50 à 80 euros par jour, dit la travailleuse de rue, Andrea Weppert. Dans les maisons de passes, où il y a beaucoup de clients le prix de la chambre peut aller jusqu'à 160 euros/jour. Les conditions de travail auraient "empiré ces dernières années". Dans l'ensemble, en Allemagne, il y aurait "plus de services pour moins d'argent dans des conditions beaucoup plus risquées qu'il y a dix ans".
Que les femmes affluent sur le grand marché de la prostitution, même les tenanciers de bordel le confirment. Holger Rettig de l'UEGD dit que depuis l'entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l'UE, l'arrivée de femmes de ces pays a beaucoup augmentée. "Cela a conduit à une chute des prix", dit Rettig. Dans la prostitution règnerait une "logique mercantile radicale, pas sociale".
Le président de la police munichoise, Wilhelm Schmidbauer, se plaint du "trafic humain en provenance de Roumanie et de Bulgarie (qui) a explosé" Mais il n'a aucun moyen pour enquêter. Il n'a pas le droit de recourir à l'écoute téléphonique. "Résultat : il n'y a pratiquement aucune plainte concernant un trafic humain" dit Schmidbauer. "Nous ne pouvons rien prouver".
C'est ainsi qu'il est quasiment impossible de suivre la trace qui conduit des coins les plus misérables d'Europe où se trouve de la marchandise fraîche jusqu'aux bordels allemands. Marchandise comme Sina. Elle a raconté aux psychologues du centre d'informations pour les femmes de Stuttgart son chemin jusqu'aux bordels forfaitaires d'Allemagne.
Corhana, son village roumain d'origine, qui se trouve à la frontière de la Moldavie, ne possède aucun réseau hydraulique. Sina et les autres filles allaient tous les jours à la fontaine. C'était une scène comme dans "Cendrillon" : à la fin, toutes rêvaient de l'homme qui allait venir les tirer de leur triste quotidien.
L'homme qui passa finalement à côté de la fontaine avec sa grosse BMW s'appelait Marian. Sina tomba amoureuse de lui au premier regard. Il parla de travail en Allemagne, ses parents signèrent le formulaire dont elle avait besoin pour voyager étant mineure.Lors de la traversée en bateau en Rhénanie-Palatinat, il lui donna de l'alcool et coucha avec elle.
Marian la livra ensuite au bordel forfaitaire "No limit". Sina avait juste 16 ans et dut servir jusqu'à 30 hommes par jour. De temps en temps, elle recevait une ou deux centaines d'euros. Un moment donné, Marian la renvoya en Roumanie de peur des contrôles de police. Mais elle revint et continua. Le conte ne s'appelait plus "Cendrillon" mais "Pretty Woman". Elle espérait qu'un client tomberait amoureuse d'elle et la délivrerait.
Est-ce que la loi sur la prostitution a amélioré la vie de femmes comme Sina ? La ministre de la famille fit faire, cinq ans après, une évaluation pour déterminer ce qu'avait apporté la loi sur la prostitution. Dans le compte-rendu, il est écrit que le but ne serait atteint que de facon "assez limitée". La libéralisation de la prostitution n'aurait "pas eu d'effet vraiment mesurable sur l'amélioration des conditions de sécurité sociale des prostituées". Pas plus les conditions de travail que les possibilités d'en sortir n'auraient progressé. Et pour ce qui est "d'un effet de diminution de la criminalité" par cette loi, il n'y aurait "jusqu'à présent aucune preuve tangible".
Il n'y a guère de tribunal qui peut témoigner d'une plainte déposée par une prostituée sur son salaire. Seul 1% des prostituées disent avoir signé un contrat de travail. Cela n'a servi à rien de la part du syndicat Ver.di d'avoir concu un formulaire modèle "dans le domaine des services sexuels". Lors d'un questionnaire de Ver.di, une tenancière de bordel (elle voulait se prémunir d'une descente) affirma qu'il y avait dans cette loi plus d'avantages pour les tenanciers de bordel que pour les prostituées.
Si quelqu'un, en Allemagne, veut ouvrir une baraque à frites ambulante, il/elle doit se conformer à la norme DIN 10500/1 pour "véhicule de commerce pour aliments facilement périssables" dans laquelle il est écrit qu'il doit s'y trouver un distributeur de savon et des serviettes jetables. Un tenancier de bordel n'a pas de contrainte de cette sorte : il doit juste dire quand il ouvre sa boutique.
Les prostituées continuent à ne pas rendre public leur existence auprès de l'administration [en Allemagne, il est obligatoire pour avoir un logement de s'inscrire à la police du quartier. C'est cela que ne font pas les prostituées, ce qui leur enlève d'ailleurs pas mal de droits comme, par exemple, celui d'accéder à une assurance sociale NDLT]. À Hambourg avec son célèbre Reperbahn [quartier de la prostitution NDLT] seules 153 femmes ont suivi le réglement et se sont inscrites au fisc de la ville de la Hanse ["ville de la Hanse" = (ici) synonyme de "Hambourg" NDLT]. L'État veut que les prostituées paient des impôts. Doit-il en contrepartie établir des règles pour ce métier ?
Quel rôle étrange l'État s'est-il choisi, c'est ce que l'on peut observer dans les rues de Bonn. Le soir, les femmes doivent retirer un ticket du fisc à un distributeur automatique pour prostituées, valable jusqu'au lendemain matin 6.00 h. Le ticket coûte six euros.
Dans le nord de Cologne, où la ville possède un trottoir près de la Geestemünder Straße pas loin de l'usine Ford, on ne prélève pas d'impôt. C'est un projet social. Sous le toit d'une grange, on a installé des box pour la prostitution. Il manque un panneau indiquant "trottoir" ; un panneau devant l'aire grillagée où l'on ne rentre qu'au maximum à 10 à l'heure et ressort dans le sens des aiguilles d'une montre.
Le long du bord intérieur, ce soir glacé de printemps, 20 femmes sont là, quelques unes ont apporté un siège de camping, d'autres sont assises dans une cabine de bus recyclée. Lorsqu'un client s'est entendu avec une prostituée, il se rend en voiture dans l'un des box : sous le toit de grange, il y en a 8 de cette sorte, et, pour les cyclistes et les piétons, une pièce spéciale avec un sol en béton ou un banc de parc. Dans chaque box, il y a un bouton d'alarme, le service social des femmes catholiques est tous les soirs sur place.
Alia, une femme de 23 ans, avec une perruque blonde et engoncée dans un corsage, tente de dissimuler son haleine sentant l'alcool à l'aide d'un bonbon à la menthe. Alia dit d'elle et de ses collègues : "Qui travaille ici, a de sacrés problèmes" [elle veut dire : "psychologiques", NDLT].
Le chemin d'Alia jusqu'à la Geestemünder Straße part de l'école qu'elle a abandonnée et d'un copain chez qui elle s'est installée et qui l'a envoyée se prostituer. Elle aurait commencé à se prostituer par "manque d'argent et par amour". Marijuana, cocaine, amphétamine et alcool s'y sont ajoutés. "Il n'y a pas de prostitution sans contrainte ni détresse" dit-elle. Cela fait trois ans qu'elle est là. "Une femme qui va bien ne fait pas ce travail".
40 euros, ce fut jadis le tarif des relations vaginales et orales dans la Geestemünder Straße. Mais quand Dortmund a fermé son trottoir, il est venu plus de femmes à Cologne, dit Alia. "Il y en a de plus en plus et elles abaissent de plus en plus les prix de facon à avoir au moins quelque chose", se plaint-elle. Les Bulgares et les Roumaines prendraient parfois moins de 10 euros. "Il y en a une ici qui le fait même pour un Big Mac".
Mais les femmes d'Europe de l'Est ne travaillent guère dans la Geestmünder Straße. Les contrôles réguliers de passeport par la police les en ont chassées - alors que ces contrôles devaient permettre de trouver et de protéger les victimes de trafic humain et de prostitution forcée. Maintenant les filles travaillent sur le trottoir de Cologne-Sud. Mais les prix se détériorent au nord comme au sud.
La fondatrice du "groupe de travail sur le trafic humain" au congrès US, Caroline Maloney, déclara en 2007 à propos des suites de la légalisation de la prostitution autour de la ville du jeu, Las Vegas dans le Nevada, "Nous avons été naifs de croire que la prostitution légale améliorerait la vie des prostituées, ferait disparaître la prostitution située hors des circuits légaux, et aurait éloigné de ce commerce les organisations criminelles", dit la femme politique du parti démocrate "comme tous les contes de fées cette croyance s'est avérée relever de la pure imagination".
Les enquêteurs du milieu se plaignent de n'avoir aucune possibilité d'entrer dans les bordels.L'Allemagne serait devenue "le centre de l'exploitation sexuelle des jeunes femmes d'Europe de l'Est et le champ d'action des groupements mafieux du monde entier" d'après l'inspecteur criminel en retraite, Manfred Paulus de Ulm, qui fut autrefois enquêteur dans le milieu de la prostitution et s'occupe maintenant d'avertir les femmes de Bulgarie et de Biélorussie de ne pas se laisser entraîner en Allemagne.
D'après les statistiques, l'Allemagne n'aurait aucun problème avec la prostitution et le trafic humain. Selon la police criminelle (BKA), on a recensé, en 2011, exactement 636 cas de "trafic humain avec projet d'exploitation sexuelle", presque un tiers de moins que dix ans auparavant. 13 des victimes avaient moins de 14 ans, les 77 autres n'avaient pas encore 18 ans.
Il y aurait beaucoup de femmes des pays de l'UE "dont la situation est soupconnée de relever du trafic humain, cependant les preuves sont difficiles à rassembler" d'après la BKA. Tout dépend donc des témoignages des femmes. Sauf que "principalement les victimes présumées de Roumanie et Bulgarie, montrent peu de volonté de coopérer avec la police et les centres de conseil". Et si les femmes arrivent tout de même à témoigner de quelque chose, elles se rétractent plus tard".
Une étude de l'institut Max Planck sur le droit pénal international et étranger assure que les chiffres officiels concernant le trafic humain ne témoignent guère "de l'ampleur véritable du délit".
La commissaire européenne Cecilia Malmström a déposé il y a peu un compte-rendu sur le trafic humain, dans lequel on dénombre 23 600 victimes, les 2/3 exploitées sexuellement. La Suédoise voit là un signe que les bandes criminelles étendent leur commerce. Malgré cela le nombre de cas jugés diminuent parce que la police ne peut rien faire. Malström enjoint l'Allemagne à faire plus d'effort.
Mais que faire puisque la loi allemande sur la prostitution soutient les trafiquants ? La loi n'aurait-elle pas d'ailleurs développé la prostitution et ainsi le trafic humain ?
Axel Dreher, professeur de politique de développement économique internationale, titulaire d'une chaire à l'université de Heidelberg, a essayé de répondre à cette question. Dreher a examiné les statistiques de 150 pays, ses données étaient imprécises, comme tout dans ce domaine, mais il a pu isoler une tendance : là où la prostitution est légale il y a plus de trafic humain qu'ailleurs.
La plupart des femmes qui arrivent dans la prostitution en Allemagne ne sont pas kidnappées dans la rue, la plupart d'entre elles ne croient pas sérieusement qu'elles vont travailler ici comme marchandes de petits pains. Souvent elles suivent volontairement, comme Sina, un homme dont elles sont tombées amoureuses, ou elles savent, comme Alina, qu'il s'agit de prostitution. Mais elles ne savent pas l'horreur qui les attend et qu'il ne restera presque rien de leur argent.
Là-dessus s'ajoutent des cas terrifiants. En décembre, le film "Filles jetables" de la série "Tatort" [= "Lieu du crime" [NDLT] de Hanovre a choqué le public télévisuel. Des proxénètes jetaient après une orgie sexuelle deux jeunes femmes grièvement blessées dans une poubelle comme des détritus. Quelques jours seulement après cette projection la police munichoise trouvait sur un petit carré de pelouse de Munich une chose humaine gémissante à peine vêtue.
Elle avait 18 ans et s'était enfuie d'un bordel. La Roumaine raconta à la police qu'elle avait été abordée dans la rue de son village natale par trois hommes et deux femmes. Les inconnus lui auraient promis un job comme bonne d'enfants. Lorsqu'elle est arrivée à Munich, ils lui auraient bandé les yeux et l'aurait conduite dans une cave blindée dont la porte ne s'ouvrait qu'avec un code de sécurité.
Dans la pièce sombre d'autres filles étaient assises sur des lits superposés, derrière le mur, on entendait de l'eau couler. La police suppose que la cache se situe dans une usine vide près de l'Isar. Les hommes l'ont violées puis battus lorsqu'elle a refusé de travailler dans un bordel.
La police n'était d'abord pas sûre de la véracité de l'histoire. Mais la fille se souvenait des noms des proxénètes. Ils ont été arrêtés et mis en garde-à-vue. Mais comme ils se taisent, la police n'a pas pu trouver la cache sinistre jusqu'à aujourd'hui. La Roumaine a été placée quelque part dans un programme de protection des témoins.
Parfois, les filles sont envoyées par leur famille. Comme Cora de Moldavie (suite et fin ici).
Merci! Ca me glace. Je fais circuler.
RépondreSupprimerMerci beaucoup ! Ce ne sont que les pages 56 et une partie de la page 57 (l'article s'étend de la page 56 jusqu'à la page 65). Je ferai le reste petit à petit. :)
RépondreSupprimerAh vraiment, un grand merci Euterpe pour cette traduction !!
RépondreSupprimerJe voulais l'acheter et le lire, mais je ne suis pas très bonne en allemand
Merci de tes encouragements, antisexisme. Voilà 4 pages de traduites. Il en manque encore 5, pouh ! Mais je vais tout traduire, cela en vaut la peine.
SupprimerEuterpe,
SupprimerJ'ai moi-même terminé hier soir une traduction de cet article! Je te l'envoie si tu veux? Elle n'est pas encore en ligne. Tu pourras conserver le meilleur de nos solutions respectives. As-tu une adresse courriel?
Martin Dufresne
martin@;aurentides.net
hello, j'ai mis en ligne la traduction de Martin sur mon FB via scoop-it : http://sco.lt/5T0lRB
RépondreSupprimerGénial ! Cela m'a facilité la tâche !
SupprimerMerci à vous deux!
RépondreSupprimerCette version est aussi affichée depuis quelques heures sur le blog EN QUELQUE SORTE : http://enquelquesorte.blogspot.ca/2013/06/dossier-du-spiegel-bordel-allamagne.html
- et à voir ce texte connaître une aussi vaste diffusion, les employé-e-s du STRASS déchirent leur chemise sur une liste de diffusion féministe (EFiGiES), dont ils et elles cherchent à chasser toute critique du système proxénète!
Oui, ce texte est une grande claque pour le STRASS (et pour les féministes pro-prostitution).
SupprimerJe viens d'essayer de t'envoyer un email mais il est revenu. N'y aurait-il pas une erreur dans la transcription de l'adresse ?
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