ANgrywOmeNYMOUS


vendredi 15 juillet 2011

Strauss-Kahn et autres - Le viol est une affaire politique


En Amérique il passe pour un Hate Crime - ici il est traité comme une "affaire privée"

Quand dans le Brandebourg ou en Bavière ou je ne sais où en Allemagne, un turc, un asiatique ou un africain se fait tabasser par des néonazis, ce n'est pas seulement un drame humain, mais pour les médias aussi bien que pour les gens, c'est une affaire politique : une expression du racisme, une honte pour l'Allemagne, quelque chose qu'il faut à tout prix combattre. Lorsque devant la synagogue de Francfort, d'Osnabrück, de Berlin ou peu importe laquelle, des types de droite ou des islamistes tabassent un juif, ce n'est pas seulement un drame humain mais pour les médias ainsi que pour les gens, c'est une affaire politique : une expression de l'antisémitisme, une honte pour l'Allemagne et quelque chose contre lequel il faut absolument lutter.
Quand à Schwetzingen ou à Paderborn ou ailleurs une femme est violée - alors il s'agit d'une "affaire privée", de "sexe consensuel" probablement, et seulement dans le cas d'une justice particulièrement équitable, d'un crime à élucider. Quoi qu'il en soit, seules deux personnes sont concernées : le coupable et la victime.

En Amérique en 2011, les choses sont bien différentes comme nous l'apprenions il y a peu avec l'affaire Strauss-Kahn. A la deuxième convocation au tribunal, l'avocat de la partie civile qui défend contre son puissant accusé la présumée victime restée cachée, Kenneth Thompson, la tête haute déclara devant les médias : "Tout l'argent, la puissance et l'influence de Dominique Strauss-Kahn ne changera rien à ce qui s'est passé dans cette chambre du Sofitel". Et l'avocat noir d'ajouter au nom de sa mandante : "Nafissatou Diallo défend sa dignité - elle est la voix de toutes les femmes du monde entier qui sont victimes de violences sexuelles".
Car maintenant, il est clair pour tous en Amérique qu'ici, il ne s'agit pas seulement de deux personnes, qu'ici il s'agit de se demander : "Qu'est ce qui s'est passé entre deux êtres humains dont l'un est un homme, blanc, riche et puissant et l'autre une femme, noire, pauvre et impuissante ?"
Il s'agit donc bien ici de "Hate Crime", un crime de haine, parce que, si les choses se sont passées comme le dit cette femme - le coupable ne s'en est pas pris à elle en particulier, mais à toutes les femmes, à toutes les noires, à toutes les femmes de chambre (ou autres subalternes). Toutes personnes humaines enfin avec lesquelles il est en mesure de le faire.

Car les humains ne font pas cela à d'autres humains. Ils font cela à des "sous-humains". Et c'est pourquoi le droit américain en lutte contre cette forme de seigneurialité a introduit le terme "Hate Crime". Un "acte criminel qui est motivé par des préjugés de la part du criminel envers une personne ou un groupe de personnes".

Le terme n'était auparavant valable que pour les membres d'une race ou d'une religion, mais a été élargi en 2009 aux catégories sexuelles et d'orientation sexuelle.
Celui qui commet ce genre de Hate Crime est passible de sanctions sévères et menacé de peines élevées. Avant tout les médias et les gens comprennent que, par exemple, dans le cas du viol, il ne s'agit pas de sexe mais de violence sexualisée, de haine envers les femmes.
Après que l'on eut eu connaissance de l'affaire Strauss-Kahn, il a fortement été question dans les médias d'"hommes puissants" qui ne se maîtriseraient pas. Je ferais une remarque à ce sujet : d'abord tous les hommes puissants ne violent pas les femmes. Ensuite la puissance est relative : un père de famille chômeur peut lui aussi se comporter comme un tyran entre ses quatre murs. Alors : oui, la puissance est une condition indispensable pour humilier des non puissants mais pour cela on n'a pas besoin d'être le chef du FMI.
Et en ce qui concerne la multiplication soudaine des cas de violence sexuelle enregistrés, il se peut qu'ils soient plus souvent portés qu'avant à notre connaissance parce que les victimes, femmes et enfants se défendent plus qu'avant mais ne sont pas encore suffisamment capables de se défendre quand même. En tout cas pas en Europe.
Les victimes ont peut-être commencé à parler et les lois se sont un peu renforcées pour leur protection mais maintenant la partie adverse s'arme. Et son arme la plus efficace est le doute. Le doute envers la victime. Et nous le savons bien : "le doute profite à l'accusé".

Extrait de l'article d'Alice Schwarzer paru dans Emma, n° d'été 2011, traduite au pied levé par Euterpe

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